L'accord en question ne s'applique pas aux eaux territoriales du Sahara occidental «Le Front Polisario n'a d'autre choix que de saisir, à nouveau, les juridictions de l'Union européenne...pour demander l'annulation des négociations en cours», a déclaré M'hamed Khaddad, Coordonnateur sahraoui avec la Minurso. La bataille continue. L'Union européenne a finalement décidé de mettre sa crédibilité en jeu. De ternir son image d'institution respectueuse de la légalité internationale. Les premiers signes de cette potentielle entorse à l'arrêt de la Cour de justice européenne se sont manifestés le 16 avril, lorsque les Etats membres de l'Union européenne avaient donné leur feu vert pour lancer de nouvelles négociations à propos de l'accord de pêche conclu avec le Maroc. L'UE avait pourtant tenté de rassurer l'opinion internationale en général et le peuple sahraoui en particulier. L'accord de pêche qui la lie au Maroc, qui doit être renégocié, «respectera scrupuleusement la décision de la Cour européenne de justice (Cjue) qui a conclu que l'accord en question ne s'applique pas aux eaux territoriales du Sahara occidental», avait déclaré, le 16 avril 2018 la ministre espagnole de l'Agriculture et de la Pêche, Isabel Garcia Tejerina lors de son arrivée à Bruxelles pour participer à une réunion avec ses homologues européens. Les négociations qui doivent être lancées à cet effet «ne portent pas sur la prorogation de l'actuel accord de pêche (qui expirera le 14 juillet 2018), mais concernent un nouvel accord qui tient compte de la décision de la Cjue» avait assuré la ministre espagnole dont le pays porte une responsabilité historique dans le conflit du Sahara occidental. Les premiers sons de cloche laissaient pourtant entendre tout le contraire. La Commission européenne avait en effet annoncé qu'il était possible d'étendre les accords bilatéraux avec le Maroc au Sahara occidental sous certaines conditions. Dès lors il fallait comprendre que l'on se dirigeait tout droit vers une transgression de l'arrêt rendu par la Cjue. Que stipulait-il? Il a notamment relevé que l'UE et le Maroc ont appliqué l'accord, qu'ils ont mis à exécution le 28 février 2007, au Sahara occidental sans qu'ils aient jugé utile de tenir compte du «statut séparé et distinct» du Sahara occidental qui, rappelons-le, est inscrit sur la liste de l'ONU des territoires qui restent à décoloniser. La sentence est tombée comme un couperet. «Compte tenu du fait que le territoire du Sahara occidental ne fait pas partie du territoire du Royaume du Maroc, les eaux adjacentes au territoire du Sahara occidental ne relèvent pas de la zone de pêche marocaine visée par l'accord de pêche», avaient jugé les magistrats européens. «En concluant cet accord, l'Union européenne (ndlr) a violé son obligation de respecter le droit du peuple du Sahara occidental à l'autodétermination», ont souligné les juges de la Cour européenne dans leur arrêt rendu, le 27 février 2018. Clair net et précis! Pas pour L'UE et encore moins pour le Maroc qui a annexé les territoires sahraouis. La renégociation de l'accord de pêche entre l'UE et le Maroc qui ne tient pas compte du statut du Sahara occidental n'est ni plus ni moins qu'une caution à son occupation par le Maroc. Le Front Polisario, qui avait vivement protesté contre l'annonce de la Commission européenne qui n'a pas exclu d'inclure les eaux territoriales sahraouies dans ses nouvelles négociations avec le Maroc, a décidé de traîner ces deux «alliés» devant les tribunaux. «Face à l'incapacité de la Commission européenne à assurer le respect des arrêts de la Cour, le Front Polisario n'a d'autre choix que de saisir, à nouveau, les juridictions de l'Union européenne, au nom du peuple du Sahara occidental, pour demander l'annulation des négociations en cours» a déclaré M'hamed Khadad, Coordonnateur sahraoui avec la Minurso qui souligne qu'elles ne pourront que déboucher sur un nouvel accord illégal. Il y a fort à parier que l'UE risque fort de perdre son «âme» dans cette affaire. Quant au Maroc il y a belle lurette que c'est déjà fait.