La loi de finances afférente à l'année 2023 sera la première loi préparée Cet avant-projet qui pose la problématique de la gestion des finances du pays, ressuscite les peurs de certains, les fantasmes des autres, mais risque de détruire bien des conforts. Le texte de loi organique relative aux lois de finances a été présenté hier, en séance plénière du Conseil de la nation, tenue sous la présidence de Abdelkader Bensalah et en présence du ministre des Finances, Abderrahmane Raouya. Adopté en mai dernier au niveau de la chambre basse du Parlement, ce texte qui introduit un nouveau cadre de gestion des deniers publics est en réalité un événement politico-financier majeur. Composé de 91 articles, ce texte replace la discussion budgétaire au coeur du débat parlementaire tout en organisant des mécanismes d'information et de contrôle, notamment par le rapprochement de la comptabilité de l'Etat sur celle des entreprises. Il vise deux objectifs principaux: réformer le cadre de la gestion publique pour l'orienter vers les résultats et la recherche de l'efficacité, et renforcer la transparence des informations budgétaires. Le dossier est passé presque inaperçu ne suscitant aucune «boursouflure» médiatique. Passera-t-il avec la même facilité au Sénat? Bien ficelé, il a été servi frais aux parlementaires qui, vraisemblablement assommés par le jeûne, n'y ont vu que du feu. Pourtant, les députés étaient en train de discuter une sorte de «Constitution financière de l'Etat». Le premier député à poser crûment ses craintes a été Djelloul Djoudi du Parti des travailleurs. Djoudi a estimé qu' «il y a violation des articles de cette loi par des décrets exécutifs». L'une de ces «nouveautés» qui font peur dans ce projet est que désormais, une loi de finances sera établie sur la base des objectifs et non pas selon les besoins des différents départements ministériels. On s'interroge alors sur ce qui adviendra du ministère de la Solidarité nationale, des subventions et de la protection des couches sociales défavorisées. Pourtant, sur cette question précise, le président de la République a été intransigeant. Pour mieux ficeler cet article, il est donné au ministère des Finances la possibilité de changer une dotation budgétaire d'un ministère durant l'exercice annuel. Cela peut intervenir sur une loi de finances qui a été préalablement adoptée en Conseil des ministres et signée par le président de la République. Autres nouveautés, c'est que l'Etat peut financer des investissements privés. C'est une première en Algérie. Dans le rôle qui est le sien, l'Etat a toujours financé des investissements publics, mais jamais privés. Il ne faut pas faire la confusion avec les crédits accordés par l'Etat à travers les banques et sous différentes formes pour financer des projets d'investissements privés, mais jamais dans l'argent du Trésor public. C'est dire qu'un sérieux et déterminant virage venait d'être négocié par la République. Pour Djelloul Djoudi du PT «l'Etat est en train de changer de nature et de manière profonde». L'entrée en vigueur de ce texte de loi n'interviendra pas immédiatement après sa publication au Journal officiel. La loi de finances afférente à l'année 2023 sera la première loi préparée, discutée et exécutée conformément aux dispositions de ce texte de loi. Abderrahmane Raouya répond au FMI «L'Algérie est souveraine dans ses choix!» Le ministre des Finances, Abderrahmane Raouya, a défendu, hier, la décision de l'Algérie de recourir, depuis la fin 2017, au financement non conventionnel pour couvrir une partie des dépenses publiques en rappelant que le pays était «souverain» dans ses choix économiques et financiers. Invité par la presse à commenter le dernier rapport du FMI sur l'évaluation de l'économie algérienne, où l'institution de Bretton Woods a suggéré «l'arrêt du financement monétaire dès cette année», M. Raouya a refusé tout recours à l'endettement extérieur par l'Algérie. «Bien sûr, ils (le FMI, ndlr) veulent que l'Algérie aille vers l'emprunt extérieur, mais nous sommes souverains dans notre pays et, en toute objectivité, nous espérons que ce sera comme nous l'avons souhaité», a déclaré M. Raouya en marge de la présentation au Conseil de la nation du texte de loi organique des lois de finances. Dans son rapport, le FMI a soutenu que les autorités algériennes disposaient encore «d'une fenêtre d'opportunités» pour «atteindre le double objectif de stabilisation macro-économique et de promotion d'une croissance durable». Mais cela nécessitera, selon le Fonds, de recourir à un large éventail d'options de financements, notamment l'émission de titres de dette publique au taux du marché, des partenariats publics-privés, des ventes d'actifs et d'emprunts extérieurs pour financer des projets d'investissements bien choisis. L'institution internationale évoque, dans ce sens, un scénario alternatif pour la relance de la croissance en Algérie en suggérant, entre autres, l'arrêt du financement monétaire dès cette année, même si elle note que le gouvernement reste engagé dans son plan de consolidation budgétaire qu'il compte reprendre dès 2019 pour rétablir l'équilibre extérieur et budgétaire dans les délais.