Il arrive parfois que les vivants, n'ayant pas de gîte, disputent aux morts quelques espaces du cimetière. Il arrive aussi, que des artistes, des désoeuvrés ou des ermites préfèrent le calme du cimetière à la cohue du monde des vivants. C'est ce qu'il est courant de voir et ce que tout un chacun a fini par accepter. Mais transformer un cimetière en un grand espace commercial releve d'une conduite irrespectueuse pour les morts et une atteinte à leur repos. Le phénomène était certes visible, depuis longtemps, au cimetière de Aïn El-Beïda, mais, il a pris des proportions alarmantes qui ont poussé plusieurs citoyens à s'interroger sur l'absence de réaction de la part des autorités locales. En effet, chaque vendredi, des dizaines de vendeurs, qui ont l'habitude de fréquenter les marchés hebdomadaires de la ville, prennent place à l'entrée et dans les allées du cimetière pour proposer leurs marchandises. Tout y passe: denrées alimentaires, effets vestimentaires ustensiles de cuisine et autres vaisselles. Encouragés par l'absence d'agents de l'ordre dans les parages, ces quidams passent toute la matinée au cimetière et ne quittent les lieux qu'après l'appel de la prière du vendredi. Le marché de Aïn El-Beïda est devenu un fait banal et ordinaire et plusieurs Oranais, en citant les rendez-vous de négoce hebdomadaires qui se tiennent dans certains quartiers de la ville, n'hésitent plus à l'y inclure. Cette situation a fait réagir plusieurs citoyens qui, en rendant visite aux sépultures de leurs proches, ont découvert que l'endroit s'est transformé en un véritable marché aux puces. La situation géographique du cimetière fait de lui un rendez-vous idéal pour un bon nombre de «trabendistes» qui viennent de Maghnia ou des petits camelots venus des 4 coins de la ville. «Tout peut être vendu ou acheté le vendredi, au marché du cimetière de Aïn El-Beïda. Vous pouvez acheter des pièces pour votre véhicule, une parabole avec démo numérique, des bijoux pour une mariée, des tissus, des produits alimentaires. Tout, il y a tout ici», dira un citoyen rencontré sur les lieux. Certaines voix se sont élevées durant le Ramadan pour appeler à une réaction des pouvoirs publics, mais sans résultat, puisque des vendeurs se sont donné le mot pour faire du cimetière un grand espace libre de négoce au détriment du repos des morts.