Le «scoop mondial» de Oussama Ben Laden a finalement coûté cher au journaliste d'Al Jazeera. La Justice espagnole a condamné, hier, lundi, le journaliste espagnol d'origine syrienne, Tayssir Allouni à sept ans de prison pour «collaboration» avec Al Qaîda. Le même jour, le chef du réseau d'Al Qaîda, en Espagne, le Syrien Imad-Eddine Barakat Yarkas, dit Abou Dahdah , présumé être le cerveau des islamistes locaux, a été condamné à 27 années de prison pour «conspiration» en vue de commettre les attentas du 11 septembre 2001. Pour Tayssir, tout a commencé avec le «scoop mondial» décroché lors de l'entretien qu'il avait eu à Tora-Bora, au lendemain du 11 septembre, avec le chef d'Al Qaîda, Oussama Ben Laden. Quelques mois plus tard, Tayssir est accusé d'avoir eu des relations avec «Abou Dahdah», chef d'Al Qaîda en Espagne, chose que le journaliste n'a jamais niée, et expliqué par le fait qu'il s'agissait uniquement de «rencontre entre expatriés syriens». Le journaliste avait été une première fois emprisonné en 2003 par le juge antiterroriste, Baltazar Garzon, avant d'être remis en liberté. En 2004, Tayssir renoue avec le «reportage subjectif» en Europe et en Afrique pour le compte d'Al Jazeera. Sa recherche du scoop, de l'information l'ont souvent poussé à emprunter des chemins tortueux, mais il s'en défend en affirmant que c'est «purement professionnel» et que les contacts établis en vue de décrocher l'information ne sont pas obligatoirement ceux que les lois reconnaissent. La condamnation de Tayssir pose la problématique de l'accès à l'information pour les journalistes spécialisés dans le sécuritaire et le volet terroriste: qu'est-ce qui est permis? Qu'est-ce qui ne l'est pas? Où s'arrête l'information? Où commence la «collaboration»? Car c'est la pire des galères que de traiter du terrorisme en s'attaquant à la source de l'information. La quasi-totalité des journalistes qui s'attaquent à l'information terroriste en s'en tirant à très bon compte, font de la sous-traitance de l'info et se contentent d'une simple ligne téléphonique pour ce faire. La chaîne de télévision qatarie Al Jazeera a affirmé, hier, qu'elle fera appel du verdict «injuste» de la justice espagnole. «Le verdict est très décevant, nous le considérons comme injuste et nous prendrons contact immédiatement avec l'équipe de défense pour étudier les possibilités de faire appel», a déclaré hier, le directeur général d'Al Jazeera, Waddah Khanfar, qui ajoute: «Nous considérons toujours notre collègue Tayssir comme innocent des charges qui lui sont reprochées.»