Washington revendique la peine de mort, Londres condamne et Madrid reporte les procès. Après la plus grande enquête de l'histoire enclenchée par les Américains sur le réseau d'Al Qaîda, au lendemain des attentats du 11 septembre, ce week-end s'est déroulé le plus grand procès du monde contre le même réseau. Hier, dans les tribunaux d´Espagne, de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis ont eu lieu simultanément des procès contre des présumés terroristes d'Al Qaîda. Hasard du calendrier ou simple coïncidence de programmation ? Les trois principaux pays de la coalition de la guerre contre l´Irak ont choisi le vendredi, journée sacrée chez les musulmans, pour juger les accusés. En Espagne, le plus grand procès contre la nébuleuse de Ben Laden jamais tenu en Europe s´est ouvert à Madrid. 24 hommes soupçonnés d´avoir constitué une cellule terroriste active et pour certains d´avoir collaboré aux attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, ont comparu devant le juge. La première audience a été consacrée à l´interrogatoire de Luis José Galan, un Espagnol converti à l´Islam, qui a nié toute appartenance au réseau terroriste d´Oussama Ben Laden. José Luis Galan a admis avoir souvent fréquenté Ben Laden, notamment à la mosquée, tout en assurant ignorer s´il recrutait de jeunes musulmans pour les envoyer s´entraîner ou faire la "guerre sainte" à l´étranger. Quelque 120 journalistes de 82 médias d´une dizaine de pays du monde entier ont suivi l´audience en direct, tandis qu´une centaine de policiers armés et assistés de chiens assuraient la sécurité du site. Douze observateurs de la Commission arabe des droits humains de sept pays arabes, anglo-saxons et européens sont venus assister au procès et s´intéressent particulièrement au cas du journaliste de la chaîne de télévision qatariote Al-Jazira, Tayssir Allouni. Il a été accusé d´appartenance à une organisation terroriste. Il comparaît libre pour raisons de santé. Parmi les accusés, il y a aussi le chef présumé de la cellule d'Al Qaîda, le Syrien Imad Eddin Barakat Yarkas, alias "Abou Dahdah". Toujours durant cette journée de repos hebdomadaire chez les musulmans, les Américains ont ramené dans le box du tribunal d´Alexandria, près de Washington, Zacarias Moussaoui. Le gouvernement américain a exigé la peine de mort pour le Français âgé de 36 ans. "Nous voulons la peine de mort dans cette affaire", a déclaré le ministre de la Justice lors d´une conférence de presse convoquée peu après la déclaration de culpabilité de Moussaoui. L'accusé a en effet plaidé coupable des six chefs d´inculpation retenus contre lui, dont quatre sont passibles de la peine de mort. Le détenu a expliqué avoir pris des cours pour projeter un avion sur la Maison-Blanche. Après avoir considéré Moussaoui comme le 20e terroriste des attentats de 2001, les autorités américaines ont modifié leurs positions en estimant qu´il faisait partie d´une deuxième vague d´attentats prévus sur la côte ouest qui n´a pas eu lieu. Quand Washington éternue, Londres prend le rhume. La Grande-Bretagne n´a pas manqué le rendez-vous de vendredi pour juger ses présumés terroristes. Un Britannique âgé de 25 ans, Saajid Badat, complice de Richard Reid a été condamné hier, à Londres à 13 ans de prison pour avoir projeté mais renoncé à faire exploser un avion de ligne dans ce qui aurait été une double attaque simultanée, trois mois après les attentats du 11 septembre 2001. Lors de son arrestation le 27 novembre à Gloucester (centre-ouest de l´Angleterre), Badat a expliqué aux policiers qu´on lui a demandé "de mener un attentat aux chaussures piégées comme Richard Reid". Le 22 décembre 2001, Reid tentait de faire exploser une charge dissimulée dans ses chaussures avec des allumettes, à bord d´un Boeing 767 d´American Airlines. Il a été condamné le 30 janvier 2003 à la réclusion à perpétuité aux Etats-Unis. Une semaine auparavant, Londres a condamné à 17 ans de prison l´Algérien Kamel Bourgass, pour un complot terroriste à la ricine, visant le train express reliant la capitale à son principal aéroport, Heathrow. Certains journaux britanniques ont cependant mis en doute la version des autorités concernant ce complot. Il faut rappeler que l´affaire Bourgas est liée à une autre affaire à Alger. Celle impliquant Mohamed Mokerba détenu par les services algériens. Sans grand bruit, la cour d´assises près le tribunal d´Alger a reporté, mercredi dernier à une date ultérieure le procès de Mokerba.