«Le vaccin fut la concorde civile, son rappel est la réconciliation nationale », dixit Abdelaziz Bouteflika. La concorde civile a été un ensemble de lois modulables, directement adressées aux personnes impliquées dans des actions de terrorisme et de subversion et qui avaient exprimé leur volonté de cesser, en toute conscience leurs activités criminelles. Elle aura donné à ces derniers l'opportunité de concrétiser, leur aspiration à une réinsertion civile au sein de la société. Elle était d'inspiration juridique, pénale mais s'était inscrite, dès le départ, dans le grand dessein de rétablissement de la concorde civile. Elle fut souvent le premier socle de l'objectif ultime qu'est la réconciliation nationale. Limitée dans le temps (de juillet 1999 au 13 janvier 2000), elle fut un préalable à la paix tant souhaitée. Canonique et purement juridique et administrative, mais très efficace puisqu'elle aura permis aux «enfants égarés» d'éteindre, dans une large mesure, le feu qui consumait toute une nation elle se démarque franchement du projet de réconciliation nationale actuel. Ce dernier, bien que venant consolider les acquis de la loi sur la concorde civile, qui aura donc permis d'épargner des milliers de vies humaines et de faire retrouver à l'Algérie sa stabilité politique, économique et sociale, mandate le président de la République à franchement s'exprimer au nom du peuple algérien, «qui s'est déjà souverainement prononcé sur la loi de la concorde» aux effets salutaires connus. Elle vient donc consolider définitivement la paix et la sécurité qui exigent plus que jamais la mise en oeuvre d'une démarche nouvelle visant à concrétiser la réconciliation nationale, seule à même de panser les blessures de toute une décennie tragique. Sortant donc du carcan normatif, le projet de charte pour la réconciliation nationale se veut résolument modificateur du cours de la récente et douloureuse histoire du pays. Un pays éprouvé mais en quête d'une réconciliation avec lui-même, et dont des ingérences criminelles ont dépravé les valeurs d'humanisme et de fraternité séculaires. Le texte du projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale transcende donc tous les clivages traditionnels et invoque littéralement la raison d'Etat! Il sollicite une approbation populaire, la revendique même afin de capitaliser les enseignements tirés de la tragédie et mieux consolider les bases de l'Algérie de demain, voulue moderne. Presque d'essence glorieuse, martyr, ce texte, soumis à référendum ce 29 septembre, fait confiance au génie du peuple algérien dont il sollicite les vertus de patience et de tolérance. Un peuple auquel il rappelle que la violence lui est étrangère et auquel il réclame un authentique pardon thérapeutique. Puisqu'il y est mentionné: Pour les citoyennes et citoyens, pour les familles algériennes, il est vital de transcender définitivement cette tragédie qui ne réside pas dans les débats théoriques, abstraits ou idéologiques, donnant lieu à des échanges de vue entre acteurs ou organisations, agissant à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire national. Outre les mesures destinées à renforcer la paix, le projet de charte pour la paix et la réconciliation intègre cette fois la reconnaissance du peuple envers les artisans de la sauvegarde de la République, tout en prônant des mesures destinées à consolider la paix tant recherchée. Il indique dans le détail les mesures à même de consolider la réconciliation, objet de ce référendum. Mais encore, il ne fait pas l'économie de toutes celles qui appuient la politique de prise en charge du dramatique dossier des disparus tout en indiquant toutes celles destinées à renforcer la cohésion nationale. Le ciment de l'oeuvre de construction et de consolidation de la paix est cette constante reconnaissance du mérite et du génie du peuple algérien faits d'abnégation et de dépassement farouche des épreuves tout au long de son histoire ancienne et contemporaine. Le projet de charte pour la réconciliation nationale est donc avant tout une affaire interne, propre à la nation algérienne par lequel celle-ci essaie de perpétuer les valeurs de la déclaration du Premier Novembre 1954.