Des dizaines de travailleurs font le pied de grue chaque week-end sur les trottoirs, en attente de «clients». Les travailleurs chinois, dans les chantiers de l'Aadl, se consacrent-ils à leur travail, ou, au contraire, font-ils des heures «supplémentaires» pour arrondir leurs fins de mois? Une question qui s'impose d'elle-même, au vu du retard accumulé (plus de trois années) dans la livraison du programme 2001. C'est aussi un phénomène qui n'a pas échappé aux citoyens. En effet, que ce soit à El Achour, Bab Ezzouar, ou un peu partout où sont implantés les chantiers de la société chinoise State Construction Engineering Corporation (CSCEC), une situation paradoxale crève les yeux : des dizaines de travailleurs font le pied de grue chaque week-end sur les trottoirs, en attente de «clients». Ces derniers qui sont pour la plupart des personnes «haut placées» envoient leurs chauffeurs ou viennent en personne pour solliciter les services de cette main-d'oeuvre, dont la qualification n'est plus à démontrer. En attestent les immeubles érigés en un temps record, au début notamment du lancement de l'opération location-vente. «Ils font un travail merveilleux (...) ce sont de véritables fourmis», nous confie un citoyen venu d'un quartier huppé des hauteurs de la capitale pour chercher de la main-d'oeuvre. Notre interlocuteur rencontré à Bab-Ezzouar, considère que «les Algériens ne sont pas assez qualifiés pour construire une belle villa». On dit même ici et là que ces ouvriers sont recommandés par de hauts responsables. D'après nos sources, la main-d'oeuvre chinoise est surtout prisée par les entrepreneurs privés pour prendre en charge - discrétion oblige - les travaux d'intérieur, à savoir les finitions (faïence, carrelage et plafonds. Un « luxe » qui ne peut être acquis qu'en catimini, «sous le manteau» selon la formule consacrée. Pourtant ces mêmes ouvriers sont censés être astreints à des règles disciplinaires draconiennes de la part de leur employeur, à savoir ne pas quitter le lieu de travail pendant les heures de service, ne pas parler avec les riverains et toute personne étrangère...et surtout ne pas s'adonner à des travaux autres que celui pour lequel ils ont été recrutés. D'après certaines indiscrétions, les Chinois qui ont observé à maintes reprises des mouvements de grève au niveau de leurs chantiers en signe de protestation contre le non-paiement de leurs salaires, préfèrent être payés «cash» par des privés. «Avoir quelques sous dans la poche durant tout le mois est nettement mieux que d'attendre l'hypothétique salaire de leur employeur», estime un entrepreneur privé. Une pratique qui n'a pas échappé à la vigilance des inspecteurs du travail, qui ont déjà surpris, en flagrant délit, des dizaines d'étrangers, en particulier des travailleurs asiatiques, proposer leurs services. Le nouveau directeur général de l'Aadl, en l'occurrence M.Kheireddine El Walid, reconnaît dans l'entretien accordé paru hier dans El Moudjahid, les retards accusés par les projets de l'Aadl. «Il faut que nos partenaires cessent de créer des alibis. Le cas échéant, nous prendrons les mesures qui s'imposent et nous deviendrons intransigeants». Contactée par nos soins, la direction générale de la Cscec, sise à El Biar, après les présentations d'usage, s'est abstenue de tout commentaire. Notre interlocuteur s'est contenté de nous orienter vers une autre personne, qui, elle aussi, n'a pas daigné répondre à nos questions. D'ailleurs, cette entreprise a fait montre, depuis son installation en Algérie, en particulier depuis le lancement en 2001 des chantiers de l'Aadl, d'un manque flagrant en matière de communication. A noter que la China State Construction Engineering, fondée en 1982, est très connue à travers le monde pour la réalisation des projets de grands immeubles. Installée au début des années 90 en Algérie, la Cscec a pris en charge un certain nombre de projets, notamment dans les domaines de l'habitat, de l'hydraulique, des infrastructures touristiques, de la santé... et de l'éducation. Cette entreprise respectera-t-elle ses engagements vis-à-vis de l'Etat algérien, à savoir livrer dans les plus brefs délais les projets qui lui sont confiés? C'est là, la question que se posent les bénéficiaires des logements Aadl.