«Les contacts réguliers» évoqués par le chef du gouvernement semblent avoir porté leurs fruits. Les services du chef du gouvernement ont rendu public hier un communiqué, appelant les archs à revenir à la table du dialogue. «A la veille de la célébration de Yennayer, le chef du gouvernement invite de nouveau le mouvement citoyen des archs à venir reprendre le dialogue déjà entamé dans le but d'aboutir à un accord global de mise en oeuvre de la plate-forme d'El-Kseur», lit-on dans ledit communiqué qui n'a pas manqué de rappeler les acquis du premier round du dialogue. La chefferie du gouvernement a évoqué «le protocole conclu le 6 janvier 2004 et complété le 22 du même mois». Outre qu'il il est souligné que «le chef du gouvernement et le mouvement citoyen des archs sont arrivés à un accord au sujet des six incidences», le communiqué informe que «la mise en oeuvre» de ces incidences «a été entamée (et) constitue un engagement qui sera appliqué». Cet appel intervient à la veille de la conférence de presse qu'organisera ce soir, l'interwilayas des archs à la Maison de la presse Tahar-Djaout. Il est clair que cette invitation au dialogue constituera, sans nul doute, le principal sujet sur lequel seront interpellés les principaux animateurs du mouvement citoyen. Il est attendu une réaction positive de «principe» à l'initiative gouvernementale, indépendamment du point 8 de la plate-forme d'El-Kseur qui évoque, rappelons-le, la constitutionnalisation de tamazight en tant que langue officielle sans condition ni référendum. En effet, l'ambiance au sein du mouvement citoyen est, affirme-t-on de sources proches des archs, à la volonté de reprendre langue avec le gouvernement, pour peu que ce dernier fasse un geste. C'est désormais fait. De plus, «les contacts réguliers» évoqués par le chef du gouvernement semblent avoir porté leurs fruits, au sens où Ouyahia ne s'aventurerait pas à lancer cet appel, s'il n'avait pas de chances d'aboutir. Cela dit, la question que se posent les observateurs est de savoir si la démarche du chef du gouvernement a le quitus du chef de l'Etat. Ce dernier, déjà très engagé dans la politique de réconciliation globale, pourrait effectivement donner sa bénédiction à l'initiative d'Ouyahia si, à terme, celle-ci amenait la région de Kabylie à adhérer au principe de réconciliation nationale telle que conçue par le chef de l'Etat. L'appel d'Ouyahia pourrait donc donner à la démarche présidentielle une base sérieuse en Kabylie. Il y a lieu de rappeler à cet effet que le coup d'envoi de la campagne pour l'amnistie générale a été donné par le mouvement associatif proche du chef de l'Etat à partir de Béjaïa. Cet état de fait met les animateurs du mouvement citoyen dans une perspective nouvelle qui les oblige, sinon à faire évoluer le discours au sein des archs, au moins intervenir, d'une manière ou d'une autre, dans le débat qui s'enclenche, sous peine d'être définitivement emportés par «la vague amnistiante». Et pour cause, l'on apprend de bonnes sources que les pouvoirs publics entendent mettre un terme à la crise de Kabylie en investissant sérieusement le terrain, dans la perspective de décrocher un taux de participation record au référendum sur l'amnistie générale dans les trois wilayas de Kabylie. Une participation massive des citoyens de la région serait, selon la vision des promoteurs du projet, une grande victoire politique, au sens que cela signifierait le rétablissement du lien entre la Kabylie et l'autorité centrale, rompu à cause des événements sanglants du Printemps noir. La reprise du dialogue avec les archs corrobore cet état de fait. Contacté par L'Expression, Farès Oudjedi de la Cicb révèle que l'interwilayas va tenir un conclave, dans une vingtaine de jours à Ighil B'amas à Tizi-Ouzou, où il sera question essentiellement de l'amnistie générale. «Le mouvement va prendre position par rapport à cette question sans recourir à la base», indique Farès qui place la problématique à un niveau éminemment politique. Mais, globalement, l'on retient des propos de Farès Oudjedi une volonté de dépassionner les débats sur la question. C'est d'ailleurs l'esprit qui règne au sein du mouvement citoyen où, dit-on, une réflexion est engagée pour ne pas être en marge, d'une manière ou d'une autre, de l'important virage que va négocier la nation. A la Coordination nationale du mouvement citoyen (Cnmc) que drive Hakim Kacimi, l'on n'est moins nuancé. Kacimi qui dit endosser totalement le programme du chef de l'Etat, a déclaré à L'Expression que sa coordination va se réunir dans le courant du mois de janvier pour formaliser sa position qui sera, à moins d'une surprise de dernière minute, en faveur du soutien à l'amnistie générale. Cependant, le même Hakim Kacimi estime que pour garantir un maximum de succès à la démarche présidentielle, «il est important d'assainir la situation créée par les événements de Kabylie. Il faut envoyer un signal fort de la part de l'Etat pour amener les citoyens à adopter l'initiative du président». Cela dit, notre interlocuteur affirme que pour le principe, il n'est pas question pour la Cnmc de recourir à des manifestations de rue, même dans le cas de refus du texte de loi par les délégués de la coordination. «Le chef de l'Etat a le droit d'en référer directement au peuple s'il le désire. Pour ce qui nous concerne, nous n'appellerons jamais à un boycott», insiste Hakim Kacimi.