Une riche production,- un album de dix chansons, un DVD, un VCD- sera lancée sur le marché juste après le mégaconcert que notre maestro animera le 31 de ce mois à la Coupole. C'est un Chérif Kheddam fatigué du poids des ans que celui qui s'est présenté, avant-hier à l'Entv, devant les journalistes de la presse nationale. «Je suis un émigré provisoire. Je ne vis en France que pour des raisons de santé, mon coeur est toujours en Algérie, parmi les miens» annonça Chérif tout en esquissant un sourire digne des grands artistes. «C'est avec fierté et orgueil que nous recevons cette richesse nationale » a indiqué, peu avant, le directeur de l'Entv, M.Hamraoui Habib Chawki. La voie est ouverte. «Je vous prie de m'excuser si je m'adresse à vous en ma langue maternelle, le kabyle. C'est l'unique langue que je maîtrise. Demandez à vos collègues de vous expliquer», a lancé, humblement, l'artiste à l'adresse des journalistes. Puis s'ensuit la longue chaîne de questions-réponses. «Je suis en Algérie pour fêter mes cinquante ans de carrière», a indiqué d'emblée Dda Chérif. La fête aura lieu le 31 octobre courant à la Coupole. Et çe ne sera pas une simple fête. Tous les élèves de ce grand maître y seront présents. Chérif préfère ne pas citer de noms. « C'est possible que, à la dernière minute, quelques-uns annulent le rendez-vous. Je préfère donc réserver la surprise à tous mes admirateurs.» Ses admirateurs se comptent en effet par milliers. Ils ont subi une sorte de sevrage tellement qu'ils n'ont pas revu leur idole depuis le 3 juillet 1993, la dernière fois qu'il s'est produit à la salle Atlas, à Alger. Depuis, on ne cesse de l'attendre. La longue attente sera enfin récompensée. Cependant , pour des causes de santé, notre chantre ne chantera en fin de compte que deux de ses titres. «Le reste, il sera fait par mes élèves». Néanmoins, certaines indiscrétions donnent d'ores et déjà le nom de l'autre génie de la chanson kabyle, Lounis Aït Menguellet. Chérif Kheddam a annoncé que la moitié de son orchestre arrivera demain de France. Tandis que l'autre moitié, elle, se trouve en Algérie. Au sujet de la nouveauté, le maestro a préféré donner la parole à son producteur Tahar Boudjeli, responsable de Antinea Production. «Nous sommes en plein chantier» a annoncé M.Boudjeli. «Actuellement, poursuit-il, nous travaillons sur un DVD retraçant le parcours de Chérif Kheddam. Il y a aussi des cassettes et des VCD. C'est en fait tout un programme qui va s'échelonner sur six mois et tous les deux mois nous lançons un produit sur le marché». Aussi, le premier responsable d'Antinea production a indiqué qu'une «nouvelle composition de dix oeuvres est fin prête. Il reste seulement à placer les voix et les musiques». A soixante-dix-huit ans, Dda Chérif produit encore et toujours. Il n'écrit pas pour lui-même mais aussi pour les autres. En ce sens, Tahar Boudjeli a déclaré qu'un «nouvel album de la chanteuse kabyle Karima , dont les paroles et la musique ont été écrites par Chérif Kheddam, sera mis sur le marché au mois de mai 2006». En sus, interrogé sur l'avenir de la chanson kabyle face au déferlement de nouveaux styles sicaux, notre artiste a indiqué: «Je suis confiant en la nouvelle génération. Bien sûr, comme dans tous les domaines, il y a des bons et des médiocres. C'est la règle du jeu qui est suivie depuis toujours. Cependant, les jeunes doivent être à la hauteur des anciens». En outre, l'auteur de Djurdjura et Amarezg b wikem isaân (heureux celui qui te possède), est longuement revenu sur son long parcours. Lequel parcours, il l'a entamé durant les années 1950, juste après son départ en exil, en France, en 1947. Le début n'a pas du tout été facile. Chérif a eu à travailler longuement dans les fonderies à Paris. Tout en menant une vie de galère, il manifeste un intérêt particulier pour la musique. Il n'avait de cesse de fréquenter les milieux artistiques parisiens. Il était même parmi les rares ouvriers à avoir un intérêt pour l'opéra. Il pénètre de plain-pied l'univers ensorcelant de la musique. Armé d'une volonté de fer, notre artiste apprend le solfège un peu tardivement, à l'âge de 28 ans. Incroyable itinéraire que celui emprunté par Dda Chérif, lui, dont la vie a été initialement destinée aux Ecritures saintes. Aussi, sa rencontre, à la fin des années 1950 avec le Tunisien Mohamed Jamoussi et l'Algérien Amraoui Missoum, a joué un rôle décisif dans sa carrière. «J'ai connu d'abord Mohamed Jamoussi. J'ai été introduit chez lui par Sid Ahmed Hachelaf, par l'intermédiaire du chanteur Amrouche Mohand qui était son ami de longue date. La rencontre a eu lieu en 1958. Et puis un jour, comme Jamoussi avait affaire, il m'a recommandé chez Missoum que j'ai côtoyé pour la première fois en 1959 pour réaliser un enregistrement», conclut Chérif Kheddam.