Cinquante ans. Chérif Kheddam a fêté lundi soir, jusqu'à une heure tardive, un demi-siècle de chansons, mais aussi de sacrifices, d'efforts et de recherche musicale. A la coupole Mohamed Boudiaf, sur les hauteurs d'Alger, il a chanté. Beaucoup, mais peu. Peu, parce que c'est beau et doux à entendre. Beaucoup, parce qu'il n'était pas « avare » de chansons. Du plus vieux au plus récent, le maestro de la chanson kabyle a émerveillé son public venu en force en cette soirée ramadanesque. Soirée organisée par l'Office national de la culture et de l'information (ONCI) en étroite collaboration avec l'ENTV. Chérif Kheddam, ou Si Chérif comme le surnomment ses amis, a fêté aussi le 51e anniversaire du déclenchement de la révolution. A sa manière. Et avec son public. La soirée était à la fois longue, riche en programme et mémorable. Elle a commencé par un petit spectacle offert par le ballet de l'ONCI, dirigé par Mme Sahra Khimda, chorégraphe, née en 1954. Avant le maître, sont passés les élèves : Kenza, Mila et Malika, trois nouvelles chanteuses, choisies par Chérif Kheddam pour reproduire quelques-unes de ses chansons. Le maître les a choisies pour les encadrer, car il veut qu'il y ait une relève. Pour cela, il faut aider la jeune génération de chanteurs à comprendre ce qu'elle fait et écrit et qu'on pourrait demain étudier. D'autres chanteurs kabyles ont été invités par le maestro pour l'accompagner dans la soirée. Il s'agit de Nouara qui était son élève, Taleb Tahar, Tayeb Brahim et Aït Menguellet et ont tous reproduit ses chansons. Manière de lui rendre hommage et de le remercier pour ce qu'il a donné à la chanson kabyle. De Akwssigh ami azizen (Je te conseille, cher fils), chantée par Nouara, à Tamurt iw thechur dhser (mon pays est beau), reproduite par Taleb Tahar. Viendront ensuite, Tayeb Brahim pour chanter Louken D Tsoughal temzi (ô si on pouvait revivre la jeunesse), Lounis Aït Menguellet Ayakhal Ighdidjen (ô terre qui nous a enfantés) et Bgayet telha, dharhuh lqbayel (Béjaïa est belle, c'est l'âme des kabyles) et Karima pour offrir au public deux chansons du nouvel album que lui a composées Si Chérif et qui sortira en novembre prochain. Le public était ravi, ému et ébloui. « Jamais de ma vie je n'ai assisté à une telle soirée », a murmuré un quinquagénaire à son épouse. Et comme le répétait souvent l'animateur de la soirée : « Lorsque Da Chérif dit que ça c'est bon, c'est sans commentaire ». Le maestro de la chanson kabyle est entré sur scène à minuit. Devant l'orchestre symphonique national composé de 40 musiciens et dirigé par Nachid Bradaï, un des meilleurs violonistes algériens, Si Chérif était debout, malgré le poids des ans. A 78 ans, il a chanté la jeunesse, les affres de l'immigration, le pays, la femme, l'amour, la misère... Bref, Chérif Kheddam a donné le meilleur de lui-même à son public, composé également de Mme Khalida Toumi, ministre de la Culture et de Abdelmalek Sellal, ministre des Ressources en eau. Il a reproduit quelques-unes de ces nombreuses ineffables et inénarrables mélodies, comme Amerzeg bw kmisan (quelle chance pour celui qui te possédera), Alemri (miroir), Djurdjura, Lghurba (l'émigration)... Il a chanté une quinzaine de chansons puisées de son riche et inépuisable patrimoine artistique.