Les fans de ce grand Monsieur de la chanson kabyle sont conviés à l'une des soirées artistiques les plus exceptionnelles de l'année. Attendu depuis longtemps, le virtuose kabyle du oud (luth), Chérif Kheddam, revient dans la soirée du 31 du mois en cours. Il animera un mégaconcert à la coupole du complexe Mohamed-Boudiaf du 5-Juillet, à Alger. La nouvelle a été annoncée avant-hier sur Berbère Télévision. Cependant, jusqu'à présent, on ne sait pas encore quel est l'organisme qui se chargera de l'organisation de ce concert qui fera certainement le bonheur de milliers d'admirateurs et de fans de cet artiste complet, ce maestro dont la vie a été destinée, par les siens, aux écritures saintes du Coran. Né en 1927 à Aït Boumessaoud en Haute-Kabylie, il fréquente l'école coranique locale avant de se rendre à la zaouia de Boudjelil en Basse-Kabylie pour poursuivre l'acquisition de la haute culture lettrée. Mais au gré des conjonctures, il change d'orientation. En 1947, notre artiste prend le chemin de l'exil vers la France. A son arrivée, il travaille comme ouvrier dans une fonderie puis à l'usine pour survivre jusqu'en 1961. C'est donc dans le contexte de l'émigration que notre maestro commence à pratiquer la musique et le chant. Sa première chanson Yellis n tmurt iw (Fille de mon pays) éditée à compte d'auteur, est perçue comme un chef-d'oeuvre par le public. Comme tous les chanteurs d'exil, Dda Chérif, pour les intimes, a bu sa part amère jusqu'au calice. Il a, en effet, mené une vie très difficile. Il ne s'adonne à son art, sa passion, qu'après une journée pénible passée au boulot. Cependant, son talent lui a valu des encouragements de la part de ses copains, notamment ceux qui ont découvert en lui un don inné pour la musique et le chant. Auteur, chanteur et compositeur, Chérif Kheddam persévère dans la voie qu'il s'est tracée. Cela grâce, notamment, à l'encouragement de ses amis, en particulier Mme Sauviat, disquaire, spécialisée dans la chanson orientale, qui, ayant remarqué la qualité de cette chanson, le dirigera vers Pathé Marconi. Ainsi la rencontre avec Ahmed Hachelef, directeur artistique, sera également importante dans la carrière de l'auteur. Les affres de l'exil et de la guerre d'Algérie le poussent au repli sur soi et à la création. De cette situation paradoxale naît l'oeuvre musicale de Chérif qui va se tourner vers une carrière professionnelle. En outre, en dépit de son âge, Chérif Kheddam s'est attaché a acquérir une culture musicale en s'initiant au solfège, au chant puis à l'harmonie. Conscient de l'indigence qui affecte le patrimoine musical enfermé dans une tradition sclérosée, il tente de l'enrichir, de le rénover sans gommer ses caractéristiques. Il a su créer un espace d'expression ouvert sur la modernité, imposer une rigueur au niveau de la création qu'il n'a pas manqué d'inculquer aux jeunes chanteurs. Il a en effet, encadré des groupes et formé des émules de la chanson moderne qui, aujourd'hui encore, se réclament avec fierté du maître. Parmi eux, on trouvera des noms connus dans la chanson militante amazighe : le groupe Yugurten, Ferhat Imazighen Imoula, Idir, Aït Menguellet, Malika Domrane, Nouara, Ahcène Abassi... Ainsi, les fans de ce grand Monsieur de la chanson kabyle et algérienne sont conviés donc à l'une des soirées les plus exceptionnelles de l'année.