Les soirées ramadanesques dans la ville de Larbaâ Nath Irathen et dans l'ensemble des villages environnants se suivent et se ressemblent. Ainsi, depuis le début du mois sacré, une monotonie ambiante s'est emparée de tous les espaces censés offrir au citoyen des moments de détente et de repos, à même de soulager un tant soit peu un quotidien fait de difficultés et de stress. Les soirées des Ath Yirathen sont donc réduites aux discussions dans les cafés et les parties interminables de dominos et de loto. Ce dernier semble être la distraction préférée de la population, toutes tranches d'âges confondus. Comme chaque année, et malgré le caractère illégal de ce genre de jeux de hasard, des hangars et des garages sont réquisitionnés pour la circonstance un peu partout dans la ville et dans les villages les plus anonymes. L'atmosphère dans ces lieux est faite de crispation par moments et de distraction et soulagement par d'autres moments. Le jeu fait parfois des heureux circonstantiels, mais «le seul gagnant, en fin de compte, n'est que l'initiateur du jeu et le propriétaire du local», comme nous l'indique un des amateurs de ce jeu. Mis à part les parties de loto et de dominos, les citoyens se trouvent confinés dans une routine qui accentue leur stress et rajoute, chaque jour un peu plus, à leur saturation mentale. Les programmes d'animation culturelle ou sportive sont quasi inexistants. Aucun spectacle ou manifestation sportive n'ont été prévu pour animer les soirées de ce mois, qui constitue une aubaine pour les familles afin de sortir et de s'évader loin de la pression et des journées moroses. Les artères de la ville qui connaissent une effervescence et un mouvement de va-et-vient juste après le f'tour commencent aussitôt à se vider et deviennent désertes aux environs de 22h. Nous rencontrons un groupe de jeunes assis sur un banc dans la place publique sirotant un café. Nous demandons à l'un d'eux comment il passe ses soirées ramadanesques, il nous répond ironiquement: «Ce que nous faisons les autres jours dans la journée, nous le faisons durant ce mois la nuit, c'est-à-dire nous adosser au mur ou nous asseoir sur ces bancs.» Une sentence qui renseigne sur le désarroi de la population irahnie et de sa jeunesse en particulier.