Le ou les commanditaires doivent être punis, disent les deux chefs d'Etat Le Washington Post évoque, opportunément, certaines des sources auxquelles se réfère la centrale de renseignements, comme cet appel téléphonique entre le frère du prince héritier, ambassadeur saoudien aux Etats-Unis, et Jamal Khashoggi. Nouveau coup de tonnerre dans le ciel en apparence serein de l'Arabie saoudite. Selon le Washington Post qui rapportait l'information dans son édition de vendredi dernier, citant des sources anonymes, la CIA a conclu que le prince héritier saoudien Mohamed ben Salmane a commandité l'assassinat du journaliste Jamal Khashoggi, à Istanbul, le mois dernier. Cette information, divulguée par le journal avec lequel collaborait le journaliste, serait un coup fatal pour la version saoudienne du procureur général du royaume qui a écarté la responsabilité de Mohamed ben Salmane. L'agence américaine de renseignements n'a, bien sûr, ni confirmer ni infirmer cette révélation du Washington Post mais il faut se rappeler que la directrice de la CIA s'était rendue, quelques jours après l'assassinat, en Turquie où lui ont été remis des enregistrements sonores. C'est ainsi que le Washington Post évoque, opportunément, certaines des sources auxquelles se réfère la centrale de renseignements, comme cet appel téléphonique entre le frère du prince héritier, ambassadeur saoudien aux Etats-Unis, et Jamal Khashoggi. Le journal américain souligne l'insistance de Khalid Ben Salmane auprès du journaliste pour qu'il se rende au consulat, à Istanbul, lui assurant qu'il n'y courrait aucun risque. Le Washington Post dit savoir, en outre, que cet appel intervenait à la demande de son frère, le prince héritier, soulignant le fait qu'on ne peut en déduire si Khalid Ben Salmane était ou non au courant des préparatifs de l'assassinat de Khashoggi. L'ambassadeur a réagi sur Twitter:»c'est une accusation grave qui ne devrait pas être laissée à des sources anonymes», a-t-il dénoncé. Ces nouveaux éléments interviennent au moment où le président turc Recep Tayyip Erdogan et son homologue américain Donald Trump ont souligné, lors d'un entretien téléphonique, leur accord pour que l'affaire «ne soit pas étouffée». MM. Trump et Erdogan «sont d'accord pour faire la lumière sur tous les aspects du meurtre de Jamal Khashoggi et pour que rien ne soit dissimulé», a affirmé une source de la présidence turque. Si Erdogan et la Turquie maintiennent la pression sur les dirigeants saoudiens qui refusent catégoriquement de livrer les 17 assassins présumés ou d'accueillir la commission d'enquête internationale demandée par Ankara, l'administration Trump observée par les rivaux démocrates, à l'affut de la moindre incartade, tente de dédouaner l'allié saoudien, fortement soutenu par Israël, tout en rassurer l'opinion américaine sur sa volonté de «punir» les coupables désignés. Ceux-là, on les connaît bien, depuis jeudi dernier, lorsque le procureur général saoudien a parlé de peine capitale, non sans avoir disculpé au préalable Mohammed ben Salmane. Anticipant des mesures sévères du Congrès américain, Riyadh qui parie sur son statut d' «allié historique» de Washington s'est empressé de donner «l'enquête officielle sur les 17 saoudiens impliqués». Dans le rapport du procureur saoudien, 21 suspects sont concernés dont 11 ont été inculpés et déférés devant la justice. Il a requis la peine de mort pour cinq d'entre eux. Fin octobre, l'Arabie saoudite qui a balancé entre plusieurs versions, avait annoncé le limogeage de cinq hauts responsables, dont deux étaient très proches du prince héritier. Premier d'entre eux, le vice-président des services de renseignement (General intelligence presidency - GIP), le général Ahmed al-Assiri, accusé d'avoir ordonné aux 15 agents de ramener «de gré ou de force» Khashoggi. Vient ensuite Saoud al-Qahtani, conseiller à la Cour royale «qui a joué un rôle central dans les préparatifs, notamment en rencontrant le chef du commando. Les trois autres sont Mohammad al-Rumaih, chef adjoint au GIP (affaires de renseignement), Abdallah al-Shaya, chef adjoint au GIP (ressources humaines), Rashad al-Muhamadi, directeur au GIP (sécurité et protection). Aucune indication sur leur sort n'a été donnée depuis, pas plus qu'on ne sait ce qui est advenu du consul saoudien à Istanbul, rappelé le lendemain même du meurtre. Le feuilleton ne semble pas avoir épuisé tous ses rebondissements et les tensions entre Riyadh et Washington vont sans doute augmenter, avec le retour des démocrates américains à la Chambre des représentants où ils vont harceler l'administration Trump sur cette affaire, parmi d'autres.