Quatre photographes s'attellent à rendre compte des spécificités de leurs régions en images. Après avoir voyagé dans plusieurs pays, l'exposition itinérante «Bamako V,... suites», réalisée dans le cadre des 5es rencontres de la photographie africaine de Bamako, est aujourd'hui à Alger où vous pouvez la visiter au Centre culturel français d'Alger où elle se tient jusqu'au 30 novembre en cours. Une quarantaine de photos de différents formats ornent les cimaises de la galerie. Quatre photographes s'attellent à rendre compte des spécificités de leurs régions en images. Dans la série «Sacred homes» datée de 1999, Zwelethu Mthethwa d'Afrique du Sud a immortalisé sous son appareil des portraits d'individus dans un espace clos, intime mettant en relief religion et pauvreté. Des photos prises dans les bidonvilles aux alentours du Cap. En couleur, ces photos témoignent du rapport au sacré de cette population noire comme le souligne cet habit chrétien et ces bougies allumées en arrière-fond de chaque image. Le Marocain Thami Benkirane a choisi, pour sa part, une image peu flatteuse de la culture musulmane et ses traditions. Plutôt il s'est attaqué à la barbarie du rite sacré que décrit la série «Revenons à nos moutons». L'immeuble du photographe est le témoin chaque année de ce rituel de l'Aïd El-Kébir où, sous le crépitement de son flash, pris d'en haut et à côté, et à mesure que le photographe s'approche et s'efface derrière ce décor fait de peau, de viande et de sang, dévoile toutes les scènes et étapes du sacrifice. «Reporter et illustrateur» de l'île de la Réunion comme il aime à se définir, André Albany, qui compte à son actif aujourd'hui quelque 10.000 photographies, mises en exergue à travers son oeuvre photographique réalisée entre 1932 et 1950, fait rejaillir cette mémoire coloniale où l'île de la Réunion a basculé du statut de colonie à celui de département français d'outre-mer, comme le montre ce Défilé de la troupe coloniale (1939), on cette «manifestation en faveur de la départementalisation devant le jardin de l'Etat, à Saint Denis» (1946). En noir et blanc, André Albany médite également sur cette spectaculaire image «L'arrivée de la lave à la mer» (1931), réalisée en compagnie du guide M. Jasmin lors de la première mission cinématographique au volcan. L'auteur de «L'incendie», Mohamed Dib se découvre photographe à nos yeux où à l'âge de 26 ans il rendra hommage à sa façon à sa ville natale, Tlemcen. A travers ces 10 photos exposées, c'est un peu l'Algérie de cette époque-là qui se déroule sous nos yeux. Et on se surprend à regarder sur ces images en noir et blanc, cette même facette de la trilogie et ce visage innocent de garçonnet qui rappelle inéluctablement celui de l'enfant Omar, ou encore cette femme s'affairant, par terre à travailler sur un panier, comme «lala Aïni» dans «Dar Sbitar». Vieux paysans, gamins immortalisés au détour d'un chemin, dédales dans un quartier, villégiature sur le dos d'un âne, c'est cette nostalgie de l'Algérie coloniale qui revient à la surface et que Dib nous donne à voir aujourd'hui, lui déjà disparu. Mais toujours présent à travers son écriture et, désormais, ses photos.