L'arbre à l'ombre duquel a eu lieu la Moubayaâ témoigne encore de la naissance de la conscience nationale. Un homme, chef de tribu répondant au nom Mahieddine était connu dans tout l'Ouest algérien pour sa sagesse et sa piété. Au lendemain de l'invasion française en Algérie, un conseil de chefs de tribus lui propose de diriger la résistance contre l'envahisseur. Il refuse diplomatiquement l'offre qui lui est faite et l'assemblée décide de se tourner vers le fils de Mahieddine, un jeune homme d'à peine 24 ans (il est né en 1808). Il s'appelle Abdelkader. Un certain 27 décembre 1832, l'émir entre dans l'histoire du pays. Il est investi Prince des croyants pour toute l'Algérie, avec pour seule et unique mission vaincre l'armée coloniale. Avec l'allégeance de nombreuses tribus de la région et d'ailleurs, l'émir Abdelakder organise la résistance et entreprend de mettre en place les fondements d'un Etat moderne. Une première expérience de ce genre en Algérie, qui donne à son promoteur une dimension de premier homme d'Etat algérien. Un Etat, né sous un arbre, un frêne, à Sahl Ghriss, dans la wilaya de Mascara. 173 ans plus tard, l'arbre est encore debout et témoigne de la naissance de la conscience nationale algérienne. Tous ces détails historiques, enseignés dans les manuels scolaires, ont fait l'objet d'une conférence animée hier au siège du quotidien El Moudjahid. Premier intervenant, M.Boutaleb, a exprimé sa profonde désolation par rapport au peu d'intérêt qu'accordent les pouvoirs publics à la commémoration d'un tel événement, relevant que les manifestations officielles autour du thème de la Moubayaâ, outre qu'elles demeurent très circonscrites, sont trop discrètes et ne rendent pas l'importance historique de l'événement. Il a, à ce propos, insisté sur l'importance de l'enseignement de l'histoire dans les écoles algériennes qui, selon lui, se doivent d'être un acteur actif de la dynamique de réappropriation des dates essentielles du combat de la société pour son indépendance. M.Merwan, s'est, de son côté, étalé sur le sens de la Moubayaâ, expliquant que celle-ci a une double signification. En plus de la Moubayaâ en elle-même qui constitue un rituel immuable dans le monde arabo-musulman, M. Merwan a évoqué sa portée historique. A l'inverse d'autres actes de même nature, celui qui a porté l'émir Abdelakder à la tête de l'Etat algérien naissant, a survécu au temps, débouchant plus d'un siècle plus tard, sur l'une des plus glorieuses révolutions de l'ère moderne.