Le ton est donné pour trois jours d'activité au niveau de la ville des Genêts. Seize ans se sont déjà écoulés depuis la disparition de l'illustre dramaturge algérien Kateb Yacine dont la mémoire sera ressuscitée cette semaine avec un hommage évocateur à Tizi Ouzou. La Maison de la culture Mouloud-Mammeri abrite, ainsi, depuis hier, une manifestation grandiose en l'honneur du père de Nedjma qui revient cette semaine comme «un mythe pluriel» à l'occasion de ce geste sublime du théâtre Jean-Sénac et l'association Massinissa de Marseille. En effet, le ton est donné pour trois jours d'activité au niveau de la ville des Genêts afin, bien évidemment, de faire connaître Kateb Yacine à la génération montante et chasser, par là même, la culture de l'oubli. C'est dans ce sens, d'ailleurs, que les organisateurs ont mis sur pied un programme aussi riche que varié pour la circonstance. Ainsi donc, une grande exposition occupe, depuis hier, le hall de la Maison de la culture de la capitale du Djurdjura. En outre, à travers des portraits, des documents, les initiateurs de cet hommage relatent l'itinéraire et l'oeuvre de l'écrivain. Cette activité a, faut-il le préciser, suscité un engouement très remarquable de la population estudiantine notamment. Il est utile de noter aussi que l'ouverture de cette manifestation a été rehaussée par la présence de plusieurs figures intimement liées au monde artistique et littéraire. D'ailleurs, M.Mohamed Lakhdar Maouga et Mme Malika Kebbas ont ouvert, juste à la fin de l'allocution inaugurale de M.Ould Ali El Hadi, directeur de la maison de la culture, le bal des conférences retenues pour ce colloque. Ils ont ainsi, au cours de leurs interventions, évoqué la diffraction linguistique dans l'oeuvre romanesque de Mouloud Mammeri. Ils ont également essayé d'établir un rapprochement entre l'oeuvre de Mammeri et celle de Kateb. Par ailleurs, dans l'après-midi de la journée d'hier, le public a suivi également un film documentaire intitulé «Kateb Yacine : écrivain public». Il s'agit d'un long métrage réalisé par Aroche et Romero en coproduction avec FR3. Mme Marie-Pierre Fernandes était aussi au rendez-vous pour donner une communication sous le thème: «Rendre accessible Kateb Yacine: son oeuvre et ses combats». Dans la soirée de la même journée, la troupe du théâtre Jean-Sénac devait présenter une pièce sur le parcours dans l'oeuvre du père de Nedjma. D'autre part, au menu d'aujourd'hui, figurent la projection du film «Kateb Yacine, l'amour et la révolution» de Kamel Dehane, table-ronde et témoignages ainsi qu'une soirée théâtrale à la cité universitaire Didouche-Mourad appelée communément l'ILE. Par ailleurs, notons qu'en marge des activités du colloque, Mohamed organise la vente-dédicace de son livre Kateb Yacine, l'indomptable démocrate. Enfin, évoquant l'oeuvre de Yacine, Hamid Aouameur, directeur du théâtre Jean-Sénac dira: «La langue magnifique de Kateb, son propos métaphorique d'une extrême actualité, fondé sur l'humour et le lyrisme, sollicitent, nous semble-t-il, les ressources de tous les gags de la manipulation, la signification dramatique et la franchise d'un théâtre populaire. Une oeuvre qui nous permet de poursuivre l'exploration d'une dramaturgie contemporaine, et la recherche d'un contact chaleureux avec le public.» Par ailleurs, il n'est pas vain de rappeler que Kateb Yacine est issu d'une famille de lettrés, dans la tribu de Keblout, à Constantine. Il est né en 1929. Après son exclusion du collège en 1945, au cours du soulèvement populaire du 8 mai, il se consacrera exclusivement à l'écriture. D'ailleurs, durant la même année, il deviendra journaliste au quotidien Algérie Républicain. En 1956, il sort son premier roman Nedjma aux éditions Le Seuil. Depuis, il se distinguera avec plusieurs autres publications à l'image de Polygone étoilé en 1966. Yacine avait aussi l'oeil très braqué sur l'art des planches. Ainsi, Le cadavre encerclé, c'est là sa première pièce avant Le bourgeois sans culotte ou le spectre du porc monceau et tant d'autres. Yacine s'éteint le 29 octobre 1989, laissant derrière lui une oeuvre palpitante et un héritage littéraire et théâtral aux multiples facettes.