Les députés britanniques votaient hier sur une série d'hypothèses pour remplacer l'accord de Brexit négocié par la Première ministre Theresa May, ce qui pourrait profondément redéfinir le processus du divorce. Maintien dans le marché unique, nouveau référendum, voire annulation de la sortie de l'UE... Le président de la Chambre des communes John Bercow doit choisir, parmi les seize propositions élaborées par les députés, lesquelles seront débattues puis soumises au vote à partir de 19h00 GMT. «Il est peu probable que les votes d'aujourd'hui révèlent une majorité pour quoi que ce soit», a souligné sur la BBC le député conservateur Oliver Letwin, qui a oeuvré pour que le Parlement prenne le contrôle de l'agenda du Brexit. «Mais j'espère que d'ici lundi, nous pourrons trouver une majorité en faveur d'une ou plusieurs propositions». Les députés veulent ainsi dégager une alternative au Traité de retrait conclu en novembre par Mme May avec Bruxelles, qu'ils ont déjà rejeté deux fois - en janvier et mi-mars - mais que la dirigeante conservatrice entend toujours faire passer. Signe de la faiblesse de sa position, Theresa May n'a imposé aucune consigne de vote aux élus de la majorité. Plusieurs membres de son gouvernement avaient menacé de démissionner si elle cherchait à imposer une ligne de conduite aux députés. Ces votes dits «indicatifs» ne sont toutefois pas contraignants pour le gouvernement et la Première ministre a déjà annoncé qu'elle s'opposerait au choix des députés s'il était en contradiction avec les engagements de son parti en faveur d'une sortie du marché unique et de l'union douanière européenne. «L'objectif que nous devrions tous avoir est de mener à bien le Brexit», a martelé Theresa May lors de la séance hebdomadaire de questions à la Première ministre. «Et la manière de garantir le Brexit est de voter pour l'accord» de retrait conclu avec Bruxelles, a-t-elle souligné au Parlement. «La Première ministre ne peut concrétiser le Brexit parce qu'elle est incapable de construire un consensus ou d'élaborer un compromis», a répondu Jeremy Corbyn, le leader du Parti travailliste. La prise de contrôle de l'agenda par le Parlement a conduit certains fervents Brexiters, dont Boris Johnson ou Jacob Rees-Mogg, président de l'European Research Group, un groupe influent de 60 à 85 députés partisans d'un Brexit sans concession, à annoncer qu'ils pourraient désormais soutenir l'accord de Mme May de crainte que le Brexit n'ait finalement pas lieu. Mais la partie est loin d'être gagnée pour la Première ministre: son allié au Parlement, le parti nord-irlandais DUP, a annoncé qu'il n'avait aucune intention de voter pour son accord «toxique», jugeant que le dispositif de «filet de sécurité» risque d'aboutir à un traitement différencié de la province britannique par rapport au reste du Royaume-Uni. Les députés doivent aussi entériner le report de la date du Brexit, initialement prévu le 29 mars, après l'accord donné la semaine dernière par les dirigeants européens. Anticipant un possible rejet du Traité de retrait, les 27 ont laissé à Mme May le choix entre deux options. Soit l'accord est adopté et le report sera de courte durée, jusqu'au 22 mai. Soit l'accord est rejeté, et Londres aura jusqu'au 12 avril pour présenter une alternative et demander un nouveau report, qui impliquerait la tenue d'élections européennes fin mai dans le pays. A Strasbourg, le président du Conseil européen Donald Tusk a appelé hier les eurodéputés à être «ouverts à une longue prolongation, si le Royaume-Uni souhaite repenser sa stratégie sur le Brexit».