Les manifestations ont repris de plus belle La fin de fonction de Bouteflika n'a pas été celle des manifestations puisque les appels à des rassemblements «monstres» ont été lancés sur les réseaux sociaux quelques heures après la capitulation avec comme slogan: «Djoumouaâte el iskate!». L'Algérie se réveille sans Bouteflika! Après six semaines de manifestations populaires et une semaine de mise en garde de l'armée, le chef de l'Etat a abdiqué. Des scènes de liesse ont suivi quelques minutes après l'annonce intervenue dans la soirée de mardi aux alentours de 19 h 45. Des milliers d'Algériens sont sortis dans les rues du pays pour fêter ce qu'ils qualifient de première, mais grande victoire. Néanmoins, même durant cette soirée des plus festives, les Algériens ont tenu à garder le caractère pacifique et digne de leur mouvement. On a assisté à une fête sans qu'il n'y ait un quelconque dépassement ou encore une humiliation du président déchu. Contrairement aux autres pays de la région ou du Monde arabe qui ont fait «tomber» leurs dirigeants, la photo ou tout autre symbole de Bouteflika n'a pas été arraché, piétiné ou brûlé. Même dans certaines administrations où les fonctionnaires ont voulu décrocher symboliquement le cadre de l'ex- président, cela a été fait calmement sans qu'il ne soit cassé ou jeté à la poubelle. Les Algériens qui ont affirmé dès le début du mouvement que ce ne sera jamais comme la Libye, la Syrie ou l'Irak... l'ont encore prouvé avec leur festoiement humble. C'est le cas par exemple à la Grande Poste d'Alger et la place Maurice Audin, places symboliques de la révolution du 22 février, où ils se sont rassemblés sous les sonorités du Hirak et des chansons patriotiques. Drapeau flottant sur le soleil étoilé d'Alger, ils célébraient le début de la nouvelle Algérie non sans remercier l'armée d'avoir soutenu le mouvement populaire. Ainsi, on pouvait entendre les fameux: «Djeich, Chaâb, khawa, khawa» (Armée et peuple, tous frères, Ndlr). Il y avait également des slogans en faveur du chef d'état-major de l'ANP et vice- ministre de la Défense nationale. Ahmed Gaïd Salah était salué par les manifestants pour sa contribution dans la fin du règne des Bouteflika. Toutefois, ils n'ont pas perdu le nord. En soulignant que nous n'étions qu'à la moitié du chemin, ils ont réitéré leur demande de la formation d'une Assemblée constituante. «L'Armée nationale populaire devra lui remettre le pouvoir», soutenaient-ils entre deux cris de joie et des «youyous». En fait, la population est loin de se contenter de la démission de Bouteflika. Pour preuve, les slogans contre le système, à leur tête le nouveau gouvernement, qui ont «bercé» cette soirée historique du 2 avril 2019. D'ailleurs, dès le lendemain, c'est-à-dire, hier, les manifestations ont repris de plus belle, et ce, à travers le pays. Toujours dans la capitale la Grande Poste était noire de monde avec des manifestants qui insistaient sur le fait que c'est «tout le système qui doit dégager!». L'une des figures emblématiques de ce Hirak, Karim Tabbou, a, d'ailleurs, rejoint la manifestation algéroise. Accueilli en héros, il s'est adressé aux manifestants pour expliquer sa vision de ce que doit être l'après-Bouteflika. Cela ne devrait être qu'un avant-goût de demain. Ce vendredi s'annonce en effet des plus chauds. La fin de fonction de Bouteflika n'a pas été celle des manifestations puisque les appels à des rassemblements «monstres» ont été lancés sur les réseaux sociaux quelques heures après la capitulation. Au début, ils portaient le nom du «Djoumaate el Ihtifal» (vendredi de la fête, Ndlr) avant de vite passer au «Djoumouaate el iskate) (vendredi de la chute du reste du régime, Ndlr). Les «3 B» (Bensalah, Bedoui, Belaïz) comme ils ont été baptisés sont en ligne de mire. On devrait encore assister à des démonstrations de force de la part de la rue, et ce, jusqu'à «Yetnahaw gaà!»...