Le départ de Bouteflika n'a pas sonné le glas de la contestation. Une nouvelle démonstration de force a été enregistrée pour ce 7e vendredi de mobilisation. Une déferlante humaine s'est abattue sur le pays repeignant toutes ses artères en blanc, vert et rouge avec comme seul message: «Trouhou gaà.» La rue ne décolère pas! Le premier vendredi après la démission du Président Bouteflika n'a pas dérogé aux six précédents: des millions d'Algériens ont envahi les rues du pays pour réclamer le départ de tout le système! «Bouteflika tu es parti, prends avec toi tes amis», est un message qui résonnait dans les quatre coins du pays. La capitale a encore une fois été le théâtre d'une démonstration de force du Hirak. Une déferlante humaine s'est abattue sur la «Blanche» repeignant toutes ses artères en blanc vert et rouge. Des millions d'Algériens venus de plusieurs wilayas, certains même à pied, ont défilé sur Alger. Pourtant, beaucoup ont été empêchés de gagner «El Mahroussa» qui n'a jamais aussi bien porté son nom. Des barrages filtrants, pour ne pas dire bloquants, ont été placés aux entrées d'Alger, notamment du côté est, à Dar El Beïda. Les forces antiémeute déployées en masse ont commencé à faire arrêter tous les véhicules touristiques, mais surtout les bus venant d'autres wilayas. Les passagers des bus ont été descendus pour des «contrôles» d'identité. La situation était au début «cool», mais plus la foule arrivait plus ça chauffait! Des affrontements ont même été enregistrés entre les manifestants et les forces de l'ordre qui ont lancé du gaz lacrymogène pour disperser la foule. «Echauffements» entre Dar El Beida et Alger... Néanmoins, cela n'a aucunement touché au pacifisme des marcheurs, et encore moins à leur détermination. Puisque leur moyen de locomotion a été bloqué, ils ont fait à pied les 26 km qui les séparent du centre de la capitale. L'occasion de s'échauffer où durant presque deux heures ils marchaient sous les chants du Hirak et des champs patriotiques, entrecoupés par les «Ulech Smah» (Pas de pardon) et «trouhou Gaa» (vous partirez tous). Ce périple ne les a pas fatigués puisqu'ils ont continué avec la même hargne dès qu'ils ont rejoint leurs compères qui eux ont gagné les rues d'«El Bahdja» dès 9 h du matin pour y mettre une ambiance de fête et de révoltes. Ils se sont d'abord réjouis du départ du chef de l'Etat et de sa smala en chantant des slogans hostiles aux Bouteflika. Toutefois, ils n'ont pas cessé de répéter qu'ils avaient gagné une bataille, mais pas la guerre. C'est dans ce sens qu'ils ont adapté les slogans à l'évaluation de la situation. Les «3B» (Bensalah, Bedoui et Belaïz), comme aiment les appeler les Algériens, en ont pris pour leurs grades. «Le peuple refuse Bensalah, Bedoui et Belaiz + tout le système», un slogan qui était parmi les banderoles que portaient fièrement les manifestants. Le Premier ministre Noureddine Bedoui et son gouvernement étaient, cependant, en ligne de mire. «Les Bedoui matzidche dkika» (Bedoui tu ne rajouteras pas une minute, Ndlr) ou encore «dégage et prends ton gouvernement de Pokémon. On veut un vrai gouvernement de transition nationale», étaient parmi les messages le plus gentils adressés par les présents... Bensalah a lui aussi eu droit à son lot de «gentillesse» à l'image du «Ya el Maroki» (le Marocain) ou d'autres qui ont symboliquement offert du cachir à son portrait! Tout comme Rachid Nekkaz qui a été hué et renvoyé par la foule. Les habitants d'Alger qui ont eux, «décoré» leurs balcons de l'emblème national, mais également de banderoles réclamant le départ du reste du système pour apporter le vrai changement. Les «3B» et le gouvernement ont en eu pour leurs grades! À la place Maurice Audin, des centaines de manifestants déploient une immense banderole: «Goulna ga3 c'est ga3» (nous avons dit tous, c'est tous). Des slogans sont scandés: «FLN dégage!», «Chaâb yourid tetnahaw ga3» (le peuple veut que vous partiez tous). Toutefois, cela n'a aucunement touché au caractère «silmiya» de la marche, marque de fabrique «made in bladi» depuis sept semaines déjà! La présence des forces antiémeute, de la police et de la gendarmerie, plus importante que les autres semaines n'a pas changé la donne. Même quand les premiers manifestants ont été bloqués au niveau du boulevard Mohammed V par la police, cela n'a aucunement dégénéré. Bien au contraire, les «Djeich Chaâb, Khawa, Khawa» (Armée, peuple frères) où encore les «Chorta, Chaâb, Khawa, Khawa» (Police, peuple frères) fusaient de partout. On a même revu les belles images de communion entre les forces de l'ordre et la population qui ont fêté ensemble cette nouvelle journée historique.