Les magistrats présents dans ce rassemblement, ont tous indiqué leur refus de faire un «faux témoignage» et cautionner «un scrutin truqué d'avance où les résultats sont déjà connus», comme le soulignent certains manifestants. Le Club des magistrats algériens a annoncé, hier, son refus catégorique de superviser et de contrôler l'élection présidentielle, prévue le 4 juillet prochain. Dans un communiqué lu devant le siège du ministère de la Justice, où des dizaines de magistrats et d'avocats ont organisé un sit-in, Merzougui Saâd Eddine, juge d'instruction près la cour de justice de Oued Souf et porte-parole du syndicat, a fait une annonce aux conséquences politiques assez graves: «Convaincus que le juge est le fils du peuple et son serviteur, qu'il juge en son nom et pour lui et en réponse aux revendications populaires, nous, membres du Club des magistrats algériens, avons décidé irrémédiablement de boycotter la supervision de l'élection présidentielle du 4 juillet 2019.» Les magistrats tournent ainsi le dos à la prochaine élection présidentielle. Déterminées à poursuivre leur mouvement de protestation, les robes noires ont pris une autre décision, celle de poursuivre au quotidien les rassemblements. Face à cet «obstacle juridique de taille», l'élection présidentielle ne peut être organisée dans les délais prévus! Dans ce contexte si particulier, on se demande, comment le système en place va réagir à cette décision qui paralysera un processus constitutionnel, actuellement la seule issue présentée par les autorités pour sortir de la crise institutionnelle. Les magistrats présents dans ce rassemblement, ont tous indiqué leur refus de faire un «faux témoignage» et cautionner «un scrutin truqué d'avance où les résultats sont déjà connus», comme le soulignent certains manifestants. Aux premiers rangs, plusieurs défenseurs des droits de l'homme ont pris part à ce rassemblement, dont des noms connus de la défense, à l'instar de Mostefa Bouchachi, Zoubida Assoul, Salah Dabouz, Noureddine Bensissad et d'autres. Le plus jeune juge de la République, Merzougui Saâd Eddine, a souligné à ce propos: «Notre détermination à demander le changement ne faiblira pas et ne sera pas démentie, quelle que soit la situation car nous appelons à la justice.» Il précisera, que, désormais, les magistrats ne renonceront pas à leurs revendications pour une justice libre et indépendante. Pour lui, malgré les intimidations et les sanctions qu'ont subies certains magistrats pour renoncer à leurs revendications légitimes d'une justice indépendante, ces derniers continueront à maintenir la pression. «Ces pratiques ne diminueront pas notre détermination à réaliser l'indépendance réelle de la justice», ajoute-t-il en soulignant que le rêve d'une justice efficace et impartiale sera réalisé! Dans ce même sillage, les robes noires ont réclamé «l'ouverture d'enquêtes sur la corruption», «l'indépendance réelle de la justice» et l'arrêt des «sanctions et intimidations sur les magistrats». De son côté, le président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (Laddh), Noureddine Benissad, a souligné à L'Expression que les revendications du Club sont très claires, ayant le même objectif avec les autres avocats «l'Indépendance de la justice». «C'est très important de souligner que nous avons réapproprié la parole et la liberté d'expression de manière à ce qu'on sache ce que les magistrats veulent dire», indique le magistrat qui explique que la commission de surveillance des élections est politique, mais la supervision des élections est faite par les magistrats, «donc ils ont décidé de boycotter l'élection du 4 juillet». Il note dans ce même sens que l'indépendance de la justice «ne peut être conçue, que dans un Etat de droit, dans une démocratie». «Aujourd'hui, le système est totalitaire et autoritaire, et ne permet pas l'indépendance de la justice qui a toujours été instrumentalisée par le pouvoir», regrette-t-il. Pour sa part, maître Hadj Bekkouche Habib Merouane, avocat à la cour d'Alger, a estimé que les magistrats ont tant réclamé l'indépendance de la justice. «Nous demandons que les juges n'aient aucun ordre à recevoir. Nous demandons aussi le renforcement de la défense. Les avocats souffrent, notamment que leurs droits soient bafoués», regrette-t-il, en ajoutant qu'il est temps pour que l'avocat ait des garanties afin d'avoir des procès équitables et justes.