La fabrication d'insuline est devenue une opération stratégique pour le pays. Le groupe pharmaceutique Saidal démystifie l'insuline. Les premiers flacons de ce produit si nécessaire aux diabétiques viennent d'être fabriqués à l'usine du groupe, installée à Constantine et dont les travaux ont commencé il y a seize mois. Elle coûtera entre 430 et 450 DA le flacon. L'insuline d'importation est cédée à un prix variant entre 700 et 800 DA. Avec sa nouvelle usine, Saidal envisage de satisfaire totalement la demande de plus de trois millions de diabétiques algériens d'ici l'horizon 2010. En attendant, elle compte déjà accaparer 60 à 70% des parts du marché national. «L'insuline 100% algérienne sera disponible au niveau des officines dans les deux ou trois mois, le temps de terminer les procédures administratives qu'exige la loi pour la mise sur le marché d'un nouveau produit», a déclaré hier à L'Expression le P-DG du groupe Saidal, Ali Aoun. Trois variétés d'insuline seront fabriquées à Constantine. Il s'agit de la Rapide, la Moyenne et la Lente, ce qui représente 90% de l'insuline importée en Algérie. Annuellement, la facture de l'insuline coûte à l'Algérie la bagatelle de 15 à 20 millions de dollars. L'usine, qui a coûté au groupe Saidal un investissement total de 1,5 milliard de dinars (environ 11 millions d'euros), produira 5 millions d'unités par an. Elle générera un chiffre d'affaires de 2 millions de dinars et va employer 70 travailleurs, dont 12 ont été formés en Allemagne aux laboratoires Aventis qui est le partenaire traditionnel de Saidal. «C'est avant tout une fierté nationale, car cette usine nous permet d'avoir une indépendance surtout stratégique». En effet, la fabrication d'insuline est devenue une opération stratégique pour le pays pour différentes raisons: d'abord parce qu'elle libère le pays d'un éventuel chantage des lobbies étrangers et par là même elle assure une sécurité à environ trois millions de personnes qui souffrent du diabète en Algérie dont près de 800.000 insulino-dépendants. L'usine, qui produira 5 millions d'unités générera, un chiffre d'affaires de 2 millions de dinars. Elle emploiera 70 travailleurs, dont 12 ont été formés en Allemagne aux laboratoires Aventis. C'est également une opération stratégique dans la mesure où elle épargne au pays des pertes sèches en devises surtout que la facture du médicament est en croissance constante. Pour l'exercice 2005, cette facture a été portée à plus de 800 millions de dollars alors qu'elle ne dépassait pas les 600 millions, il y a quelques années. Il faut dire que la réalisation de cette usine, la troisième en Afrique, s'est effectuée au forceps en raison d'une lutte acharnée entre les différents lobbyings. Annoncé comme imminent à plusieurs reprises, le lancement des travaux a été à chaque fois reporté. Malgré le nombre disproportionné d'obstacles, le P-DG de Saidal appuyé par les responsables de la santé ont tenu à l'accomplissement de cet investissement. Ce sont autant de raisons qui font que la fabrication d'insuline en Algérie constitue un défi. Un défi en termes de qualité puisque ce nouveau produit algérien requiert une assistance scientifique et technique du laboratoire Aventis. Un défi en termes de prix puisqu'il est très concurrentiel, et enfin un défi sur le temps de réalisation. Débutés en avril 2004, les travaux de réalisation ont été finalisés seize mois plus tard. Aussi, si cette manufacture fait la joie des diabétiques, il est évident qu'il n'en sera pas de même pour certains acteurs qui agissent dans le créneau pharmaceutique particulièrement juteux et dont la concurrence est féroce. Le marché du médicament a été l'un des premiers marchés ouverts à la concurrence en Algérie. «Nous sommes le seul pays au monde où existent 120 importateurs, et les grands producteurs mondiaux se sont installés dans notre pays. Et avec une pareille concurrence, notre part de marché croît chaque année de 10 à 15%», a déclaré le P-DG de Saidal. Pour rappel, l'idée d'installer une telle usine en Algérie remonte à plus de 20 ans. L'aventure commence à la fin des années 1980, quand le laboratoire Novo Nordisk avait réalisé une étude de faisabilité. Le terrorisme avait stoppé l'opération. En 1994, Novo Nordisk signe un protocole d'accord avec les trois Pharms et le laboratoire Pierre-Fabre pour la production de l'insuline avant 1999. Le projet a été bloqué suite à la dissolution des trois Pharms. En 1995, Ali Aoun, qui venait d'être installé à la tête de Saidal, relance le projet. Tout était fin prêt pour l'installation de l'usine à Tizi-ouzou (Oued Aïssi) mais les responsables de Novo Nordisk font avorter le projet. Il a fallu attendre la conclusion des pourparlers entre le groupe Saidal et le laboratoire Aventis pour que le projet naisse enfin à Constantine, au plus grand bonheur des diabétiques algériens.