«Les dépenses militaires du Maroc se font dans l'opacité la plus totale et échappent à tous les mécanismes de contrôle.» Enième verdict sans appel pour les trois pays du Maghreb : la corruption sévit dans cette région. «Les trois pays maghrébins souffrent de la dilapidation des deniers publics et de la corruption.» cette sentence a été prononcée lors d'une rencontre arrangée, il y a quelques jours, par l'organisation non gouvernementale, Freiderich Normane, sur le phénomène de la corruption au Maghreb et qui a regroupé des organisation de lutte pour l'éradication de ce phénomène en Algérie, en Tunisie et au Maroc ainsi que des représentants de l'Union européenne. «Même si notre pays a ratifié la convention internationale contre la corruption, il n'en demeure pas moins que cette gangrène a atteint les sommets de l'Etat», a déclaré, lors de cette rencontre, Djillali Hedjadj, porte-parole de l'association algérienne pour la lutte contre la corruption, une organisation non agréée. «La crainte est grande pour les 60 milliards de dollars réservés à la relance économique dans le cadre du programme quinquennal du président, surtout depuis le retour du gré à gré dans l'attribution des marchés publics», a ajouté M.Hedjadj. Le verdict allemand coïncide avec une polémique qui défraie la chronique à Alger. Un article jugé clé dans un avant-projet de loi pour la lutte contre la corruption, soumis à l'examen de l' APN, le 3 janvier dernier, a été rejeté par les députés du parti majoritaire et ceux du MSP. Les députés ont refusé l'article 7, une disposition relative à l'obligation de déclaration du patrimoine des élus. Un rejet interprété comme un cautionnement de la corruption par le élus. En 2003 quatre organismes différents ont enquêté pour la première fois sur le cas de l'Algérie. Selon l'indice de perception de la corruption (IPC) adopté par Transparency International, l'Algérie a été classée parmi les derniers au monde avec une note de 2,6 sur 10. Six autres enquêtes différentes ont été menées sous l'égide de TI en 2004. La note est presque la même: 2,7 sur 10. En 2005, l'Algérie obtient la note de 2,8 sur 10. La situation n'est pas reluisante pour le royaume chérifien. La donne s'est même aggravée durant l'année 2005. Illustrant la profondeur du phénomène, Aziza Hellak, chercheuse marocaine dans les affaires de corruption, a affirmé lors de la même rencontre organisée par l'ONG allemande, que «11 milliards de dollars ont été dilapidés dans les caisses de la sécurité sociale marocaine». Cette somme représente, selon la chercheuse, 82% des dépenses publiques du Royaume durant l'année 2005, elle signifie 30% du PIB marocain, elle est égale à 2 millions de postes d'emploi et représente environ 20.000 écoles. Des chiffres ahurissants qui placent ainsi le Maroc parmi les pays les plus corrompus dans le monde durant l'année 2005. «Les lois actuelles ne peuvent rien contre ce phénomène et la justice n'a pu récupérer que 80 millions de dollars», a indiqué Mme Belhellak pour qui les dépenses militaires sont les plus favorables à la corruption. «Ces dépenses se font dans l'opacité la plus totale et de ce fait elles échappent à tous les mécanismes de contrôle». Devenue comme une pathologie, la corruption inquiète au plus haut point dans les pays du monde arabe. Selon le rapport annuel 2005, de l'organisation internationale pour la transparence et de la lutte contre la corruption, les pays arabes payent chaque année, la bagatelle de 300 milliards de dollars en raison de cette corruption. Au-delà du manque à gagner pour l'économie de ces pays, le chiffre représente pas moins de 20 millions de postes d'emploi au niveau de ces pays. En attendant, ces pays quêtent quelques dollars de plus chez l'Oncle Sam pour lutter contre l'analphabétisme, la démocratisation, le terrorisme, le chômage...