La coordination interwilayas des ârchs, daïras et communes est convaincue que le Rassemblement pour la culture et la démocratie veut récupérer le mouvement de Kabylie. L'épisode du document remis à la représentation de l'ONU, le 30 décembre dernier, a mis à nu les desseins de ce parti. Ayant le sentiment d'être dupés, les représentants de la Cadc sont en colère contre le parti de Sadi. A présent, les ârchs mènent leur enquête, mais ils prévoient une réaction fracassante. Lors du sit-in organisé devant le siège de l'ONU à Alger, ce n'est pas le document des ârchs qui a été remis. Les RCDistes ont réussi à remettre un autre document. Un tour de passe-passe autrement douteux et qui a provoqué le courroux des ârchs. L'Expression s'est procuré une copie de ce document qui risque de se transformer en un acte de divorce entre l'interwilayas et le RCD. Composé de 6 pages, le document est réparti en 3 chapitres (social, justice et libertés et droits identitaires, culturels et linguistiques) le texte, qui a passé en revue les revendications des ârchs, a débordé sur les accords d'association avec l'Union européenne et le Haut Commissariat à l'amazighité (HCA), mais ce n'est pas tant le contenu du document qui irrite les ârchs, mais plutôt l'acte d'usurpation dont s'est rendu coupable le RCD. Un des membres des ârchs de Bouira qui étaient chargés d'élaborer le document, en voulant déculpabiliser le Rassemblement, a réussi à l'enfoncer. Le porte-parole de la délégation de Bouira, M.Kaci Yahiaoui, a, en effet, reconnu que le dernier conclave de l'interwilayas tenu à Sidi-Aïch avait décidé que le document ne serait composé que d'une seule page. Ce qui a été fait à l'unanimité de toutes les coordinations présentes au conclave. «(...) Une fois en retrait en compagnie de quelques autres délégués parmi lesquels Belaïd Abrika de la Cadc, nous avons jugé que le document était presque vide de sens (...) alors pour rendre le texte sensé et plus consistant des juristes ont été chargés de revoir la copie.» En fait des juristes proches du Rassemblement, selon des sources sûres. La nouvelle mouture était prête une journée plus tard selon le témoignage de M.Yahiaoui qui précise: «C'est à quatre heures du matin (que) nous avons eu le document explicité (...) après avoir apporté quelques correctifs, nous l'avons adopté à l'unanimité», mais on sait désormais qu'il faut soustraire à cette unanimité plusieurs délégations et porte-parole dont M.Ali Gherbi. Pis encore, les coordinations, qui n'ont pas été associées à l'adoption du nouveau document, n'ont même pas été informées de son contenu. Pour quelles raisons? Le délégué de Bouira en donne une seule. «Le seul problème que nous avons eu, c'était le temps», confie-t-il. Car l'idée de changer le contenu du document a surgi subitement l'avant-veille du sit-in. Le changement a été effectué durant la journée qui avait précédé la manifestation des ârchs devant la représentation de l'ONU à Alger et le nouveau document a été réceptionné par les collègues de Yahiaoui la veille «à quatre heures du matin». A ne pas perdre de vue que l'opération, du début à la fin, a eu lieu à Alger et non en Kabylie. Une vraie course contre la montre qui laisse penser qu'on veut cacher quelque chose. Le doute devient plus légitime encore, étant donné que le message de la Coordination interwilayas des ârchs, daïras et communes à Kofi Annan rédigé en une seule page s'est transformé en six. Les auteurs de cette bévue clament: «Nous l'avons fait en notre âme et conscience et nous n'avons jamais pensé nuire au mouvement et encore moins aux partis politiques qui nous soutiennent.» Des serments trop légers pour être fiables de l'avis des animateurs du mouvement de Kabylie. M.Ali Gherbi, qui est l'un des animateurs du mouvement, ne l'entend pas de cette oreille. Pour lui il s'agit, ni plus ni moins, que d'une récupération politique que des traîtres ont manigancée. Ce dernier accuse nommément les militants du RCD (voir l'article ci-dessous de A. Slimani). L'ont se souvient que le porte-parole de la délégation des ârchs dialoguistes, M.Allilouche qui a révélé l'énigme du document usurpé, a dévoilé le stratagème du parti de Sadi en accusant ouvertement la direction du RCD. M.Rabah Hamitouche, président de l'un des ateliers de la même délégation, a affirmé qu'une manipulation a bel et bien eu lieu. Ses auteurs, avait-il dit, «sont les gens du RCD». Ainsi les radicaux et les dialoguistes des ârchs sont, pour une fois, d'accord sur au moins un point: le RCD tente de torpiller le mouvement citoyen.