L'élimination quasi-totale des anciens chefs du Groupe salafiste pour la prédication et le combat désagrège peu à peu l'organisation. La mort, annoncée par le Gspc sur un de ses sites Internet, de l'un de ses premiers chefs fondateurs, Mohamed Bouzraïb, plus connu sous son nom de guerre Ahmed Abou Al-Baraâ, continue de mener le Gspc, qui reste le groupe armé le plus important en Algérie, vers une lente désagrégation. «Le Gspc annonce la mort de cheikh Ahmed Abou Al-Baraâ tombé en martyr le 17 Dhou al-hidja (17 janvier) lors d'un affrontement violent entre les moudjahidine et l'armée algérienne dans les montagnes proches de la ville de Toudja».annonce le communiqué du Groupe salafiste signé du «Comité d'information du Gspc». L'importance du communiqué est qu'il ne porte même plus la signature du chef actuel, Abdelmalek Deroukdel, dit Abou Mossaâb Abdelouadoud, lequel, apparemment, n'arrive plus à siéger au milieu de ses troupes en pleine déconfiture. De son vrai nom Ahmed Zarabib, cheikh Ahmed Abou Al-Baraâ, né en 1962 à Boudouaou, ville située à 5 km à l'ouest de Boumerdès, est un des éléments clés du Gspc, dont il est un des premiers meneurs avec Hassan Hattab, Nabil Sahraoui, Abbi Abdelaziz, Abdelhamid Saâdaoui, Ammari Saïfi et Abdelmadjid Dichou, le premier émir de l'organisation, abattu par un détachement de l'armée en embuscade, en 2000, dans la région de Batna. Bouzraîb avait été imam à Boudouaou avant de rejoindre les maquis islamistes de la zone II. Lors de la constitution du Groupe salafiste, et grâce à ses connaissances en matière de jurisprudence et de théologie, il est désigné «dhabit char'î», sorte d'officier juridique, ce qui lui vaut déjà de siéger avec les plus hautes instances du Gspc et de prendre les plus importantes décisions. L'homme fait de la prison, mais reprend aussitôt le maquis. En 2001, et selon des sources proches de sa propre famille et des repentis, il était question de sa reddition dans le cadre de la loi portant concorde civile, mais la négociation a fait long feu. Il y a quelques semaines, L'Expression donnait l'information selon laquelle le gros de la direction du Gspc se trouverait à Toudja, sur les hauteurs de Béjaïa, à quelque 260 km à l'est d'Alger. Et c'est là que le communiqué du Gspc donne le lieu de la mort de son chef Ahmed Abou Al-Baraâ. Le Gspc a été depuis juin 2004 totalement décapité, de sorte qu'aujourd'hui il ne reste que des éléments issus de la seconde, voire de la troisième génération de combattants du Groupe salafiste. Le 20 juin 2004, un communiqué de l'état-major de l'armée confirmait la mort de sept chefs du Gspc dans deux attaques simultanées de l'ANP à Bourbaâtache et Fenaïa, sur les hauteurs de Béjaïa. Le communiqué de l'état-major de l'armée donnait les noms des chefs abattus dont Nabil Sahraoui, Khettab Mourad, Déroukdel Abdelmalek et Abi Abdelaziz, soit les principales têtes pensantes du Gspc. Par la suite, le Gspc, par le biais d'un communiqué diffusé sur son site internet, confirmait «la mort au combat de l'émir Nabil Sahraoui et de son conseiller militaire Abbi Abdelaziz», dit Okacha El-Para, mais démentait celle de Deroukdel et de Khettab Mourad. La suite des événements confirmait cela, et Deroukdel est nommé à la tête de l'organisation à partir du 25 juin 2004 par le conseil consultatif du Groupe. La première démonstration de force de cet ancien étudiant de l'université de Soumaâ, spécialisé en électronique sera de faire sauter la centrale électrique d'El-Hamma, mais il était dit que les choses allaient se compliquer pour un groupe qui perdait ses chefs les uns après les autres. Avec la mort de Sahraoui et de Abbi, il fallait compter encore sur la mystérieuse «disparition» de Hassan Hattab (on ne voit toujours pas très clair quant à ce qu'il est advenu de lui, et tout ce qui a été dit par la suite sur son compte ne fait que rajouter doute sur doute), la capture de Ammari Saïfi, dit Abderrezak El-Para, dans le Tibesti au Tchad puis sa remise aux autorités algériennes, et l'«effacement» inexpliqué da Abdelhamid Saadaoui, chef de la zone II un des proches de Hattab. La «fin des émirs» marquera profondément le Gspc. Première conséquence: une rétention de l'information après avoir tenté de donner l'impression par différentes publications et opuscules, par la diffusion de cassettes audio et vidéo et la création de deux sites Internet de bonne facture, d'être une organisation qui fait de la communication et l'information, la priorité de ses soucis. Ses principaux sites ont été bloqués dans « la guerre des réseaux» et ses coups d'éclat deviennent de plus en plus espacés dans le temps. On devine aisément que Deroukdel n'a pas une emprise réelle sur ses troupes et qu'il trouve de plus en plus des difficultés à s'imposer au milieu de jeunes desperados dont le concept de djihad reste à cheval entre banditisme, braquage et guerre de ruse sans perspectives ni objectifs politiques clairs et définis. Cependant, le Gspc reste le groupe armé le plus dangereux en Algérie, malgré ses pertes enregistrées depuis juin 2004, c'est-à-dire depuis la mort de son chef Nabil Sahraoui dans un accrochage avec les militaires sur les hauteurs d'El Kseur. Ses forces sont estimées à quelques centaines d'hommes en armes entre 250 et 400, selon des sources militaires. Ce sont plus ses cellules dormantes et ses réseaux de soutien, estimés à quelque milliers, qui font le plus peur. Disséminés partout dans le tissu urbain des grandes villes, ils attendent patiemment l'heure propice pour passer à l'action violente. L'autre particularité du Gspc pour l'année 2006 est celle d'avoir contracté des «alliances stratégiques» avec des groupes armés réduits et en nette perte de vitesse, au centre et à l'ouest du pays. C'est dans ce cadre que s'inscrit l'assassinat de quatre agents de la société publique des eaux, assassinés le 7 janvier dernier dans la région de Tissemsilt, à 300 km au sud-ouest d´Alger, par un groupe islamiste armé. Les quatre hommes revenaient d´une mission lorsqu´ils ont été tués sur la route près de la localité de Theniet El Had, région d'activité du GIA, mais où le Gspc a pris pied.