«Les directeurs de l'éducation sont tenus d'appliquer les dispositions réglementaires». La chambre administrative du tribunal Abane-Ramdane d'Alger a tranché, hier: le mot d'ordre de grève auquel a appelé la coordination intersyndicale de l'éducation est «illégal». Suite à quoi la justice ordonne aux initiateurs de la grève l'annulation de leur mouvement. Cette décision a été aussitôt contestée par les membres de ladite coordination. Pour eux cette décision «n'est pas fondée». Cela au moment où, selon eux, le droit de grève est garanti par la Constitution. «Ce n'est pas nouveau. Nous avons vécu la même situation par le passé. Le tribunal a rendu le même verdict concernant la grève des 15 et 16 janvier», a déclaré M.Boukhetta Mohamed du Conseil des lycées d'Alger (CLA). Ainsi, y a-t-il une nouvelle décision concernant le mot d'ordre de grève après ce verdict? «C'est à la base de se décider sur la continuité ou le gel de la grève», a répondu notre interlocuteur. Pour sa part, le ministère de l'Education nationale a dans un communiqué rendu public, hier, appelé «à la conscience et l'esprit de responsabilité de chaque enseignant». Il les exhorte à «transcender les positions extrêmes prônées...» Avant de rappeler qu'en tout état de cause, «les directeurs de l'éducation sont tenus d'appliquer les dispositions réglementaires», conformément à la décision du jugement prononcé par la justice. A la lumière de la nouvelle donne, les travailleurs et enseignants de l'éducation vont-ils suivre le mot d'ordre de grève lancé par l'intersyndicale, à partir d'aujourd'hui? Les établissements scolaires seront-ils paralysés de nouveau? Une chose est sûre : la grève d'aujourd'hui est une option risquée, aussi bien pour les syndicalistes que pour la tutelle. Car c'est encore une fois l'enjeu de la représentativité qui est posé. La tutelle, faut-il le souligner, refuse toujours d'ouvrir les portes du dialogue. L'argument mis en avant est le fait que les syndicats ne sont pas agréés. Ce qui est synonyme de la non-représentativité des syndicats. De leur côté, les syndicalistes estiment que leur seul agrément est la base. L'enjeu de la grève a été confirmé, par la guerre des chiffres avancés, lors de la grève de deux jours déclenchée les 15 et 16 janvier de l'année en cours. La tutelle a avancé un chiffre de 20%, tandis que les grévistes, eux, ont donné un chiffre qui dépasse les 65%. Ainsi, la grève de ces trois journées sera une confirmation pour les uns, et une infirmation pour les autres. Nous sommes tentés de tirer deux conclusions. Primo, dans le cas où la grève serait largement suivie, ce sera alors une victoire pour les syndicalistes qui vont marquer un important point. Lequel sera la confirmation de l'adhésion de la base au mouvement syndical. Autrement dit, cela ne fera que confirmer la bonne santé de l'action syndicale. Dans ce cas, la tutelle ne pourra pas, en principe, continuer à ignorer les revendications des travailleurs. Elle se trouvera, donc, contrainte d'ouvrir les portes du dialogue. La seconde conclusion à tirer est que dans le cas où les travailleurs et les enseignants «boycottent» le mot d'ordre de grève, c'est le mouvement syndical qui en pâtira. Ce qui fait de la grève d'aujourd'hui un enjeu très risqué. Rappelons que lors d'une conférence de presse tenue la semaine dernière à Alger, les représentants de la coordination intersyndicale, regroupant cinq syndicats, à savoir le CLA, le Cnapest, l'Unpef, le Satef et le Sete de Béjaïa, ont juré de ne plus revenir sur leur décision de grève et leurs revendications, tant que la tutelle garde toujours le mutisme. Pour eux, la décision de la grève est irrévocable. Dans un autre contexte, les représentants des syndicats tiennent beaucoup à l'éventuelle déclaration d'augmentation des salaires qui serait annoncée par le président de la République à l'occasion du discours qu'il prononcera le 24 février prochain, à l'occasion du 50e anniversaire de la création de l'Ugta. «Les revendications des travailleurs et enseignants ne se limitent pas à l'augmentation des salaires. Mais nous souhaitons que le président de la République, fasse une déclaration positive dans ce sens». Faut-il souligner qu'une probable déclaration du président Bouteflika dans ce sens pourrait atténuer la colère exprimée par les syndicalistes, notamment après la déclaration du chef du gouvernement qui a affirmé que l'augmentation des salaires est illégitime.