Les établissements scolaires, tout paliers confondus, seront, probablement, aujourd'hui et demain, tous paralysés. Les travailleurs de l'éducation nationale affiliés au CLA, CNAPEST, UNPEF, SATEF, SETE (UGTA de Béjaïa) ont décidé d'enclencher un débrayage à l'échelle nationale. Le mot d'ordre de grève a été lancé par la coordination intersyndicale des travailleurs de l'éducation qui regroupe les cinq syndicats en question. Ces derniers ont, en dépit des « menaces », des « pressions », des « intimidations » et des « poursuites judiciaires », opté pour le maintien du mouvement de débrayage décidé en toute démocratie par la base et prévu pour les 15 et 16 janvier (aujourd'hui et demain, ndlr). Jeudi dernier, les chefs de file des cinq syndicats ont reçu des convocations pour comparaître devant la chambre administrative de la cour d'Alger. Les concernés se sont déplacés dans la matinée d'hier au tribunal de Sidi M'hamed à Alger. Ils ont demandé au juge le report de la séance d'au moins deux ou trois jours pour la constitution d'un collectif d'avocats. Le juge ne leur a, toutefois, accordé que quelques heures. A 15 h, les cinq syndicalistes accompagnés de leurs avocats se sont présentés devant le juge qui leur a demandé l'arrêt de la grève parce qu'elle est, aux yeux de la loi, illégale. L'avocat de la défense a expliqué que la coordination qui renferme trois organisations agréées a respecté toutes les étapes menant vers le déclenchement d'une grève. Malgré les arguments de la défense, le tribunal a déclaré, après un jugement en référé (d'heure en heure), illégale la grève lancée « par une organisation dénommée coordination intersyndicale, non agréée, et ordonne, à cet effet, l'annulation de la grève ». Le ministre de l'Education nationale a indiqué dans un communiqué qu'il appliquera les dispositions législatives et réglementaires prévues par la loi en cas de non-respect de cette décision de justice. Décision irrévocable Il lance, en outre, un appel aux enseignants de faire preuve de sagesse et de responsabilité et de porter l'intérêt de l'élève au-dessus de tout. Les représentants de la coordination estiment, quant à eux, que la décision d'aller vers une grève est irrévocable. « La grève a été décidée par les enseignants. Chaque syndicat a réuni son conseil national et, à l'unanimité, les travailleurs de l'éducation ont réclamé une grève qui paralysera toutes les écoles. Donc, pour l'annulation de cette action, il faut la réunion des conseils de wilaya, ce que l'on ne peut faire car la convocation de la base demande du temps », diront les représentants de la coordination qui ont indiqué qu'« une décision de justice ne peut nullement éteindre l'incendie social qui ravage en ce moment le secteur de l'éducation nationale ». La grève, de l'avis des enseignants, n'est pas une démonstration de force, mais un ultime recours parce qu'ils ne peuvent plus supporter ni le comportement arrogant du ministre de l'Education nationale ni l'indifférence des pouvoirs publics. « Nous vivons dans la misère, nous n'arrivons pas à subvenir aux besoins de nos familles. Le ministre ne veut pas comprendre qu'un enseignant qui n'a aucune considération et qui est devenu un simple objet ne peut pas former une génération compétente. Le règlement des problèmes des enseignants sert en premier lieu l'intérêt des élèves. Nous avons à plusieurs reprises exposé nos doléances à notre tutelle, en vain », dira un représentant d'un syndicat. Rappelons qu'un préavis de grève de deux jours a été déposé au ministère de l'Education nationale au début du mois en cours pour la satisfaction de quatre revendications essentielles, à savoir l'augmentation des salaires à toutes les catégories des travailleurs, la promulgation du statut particulier pour les travailleurs de l'éducation dans le cadre du statut général de la fonction publique, la retraite à 100% et le respect du libre exercice syndical et du droit de grève. Suite au dépôt du préavis, le département de M. Benbouzid a invité deux syndicats agréés, notamment l'Union nationale des personnels de l'éducation et de la formation (UNPEF) et le Syndicat national des travailleurs de l'éducation (SNTE), à une réunion de travail. Ce dernier qui s'est démarqué de la coordination a accepté la sollicitation du ministre et a décidé de suspendre la grève après un accord signé avec M. Benbouzid. Par contre, le dialogue entre le ministère et l'UNPEF a échoué, car le département de M. Benbouzid a insisté sur la levée immédiate du préavis de grève. Un fait que le représentant de l'UNPEF a réfuté, car la grève a été décidée par la coordination et non par le syndicat qu'il représente. En outre, la coordination a appelé à maintes reprises à l'ouverture d'un dialogue sérieux et objectif. Toutefois, la tutelle s'est entêtée dans sa logique consistant à négocier uniquement avec des syndicats reconnus par la loi. Par ailleurs, le ministre a adressé une circulaire à tous les établissements scolaires menaçant les enseignants qui prendraient part à la grève de subir des ponctions sur salaire et sur la prime de rendement. Néanmoins, cette menace n'a pas démobilisé les travailleurs de l'éducation qui envisagent d'adhérer au mouvement de grève.