Le bureau de l'Assemblée des représentants du peuple en Tunisie tiendra mercredi prochain une séance plénière consacrée au vote de confiance au gouvernement d'Elyes Fakhfakh. Celui-ci a présenté mercredi passé un gouvernement amendé après d'intenses négociations avec le parti d'Ennahdha, principale force du parlement, qui s'est engagé à soutenir cet exécutif lors du vote de confiance. Le nouveau gouvernement doit obtenir 109 voix sur 217, ce qui nécessite d'importantes négociations étant donné le morcellement de l'Assemblée, où Ennahdha ne compte que 54 sièges. Cette nouvelle liste comprend 32 ministres, dont 7 appartenant à Ennahdha, et confie les ministères régaliens à des personnalités n'ayant pas de lien direct avec des partis. L'appui d'Ennahdha ouvre la voie à l'approbation de ce gouvernement par le Parlement dans les jours à venir. Après l'échec d'un premier gouvernement en janvier, un nouveau rejet pourrait entraîner une dissolution de l'Assemblée élue il y a quatre mois, et des élections anticipées. Le président Kaïs Saïed, qui s'est retrouvé au centre du jeu politique après l'échec d'un premier cabinet formé sous la houlette d'Ennahdha, a martelé qu'à défaut d'approbation de l'exécutif présenté par le Premier ministre qu'il a désigné, il dissoudrait l'Assemblée. Il peut le faire à partir du 15 mars, si aucun gouvernement n'a été validé d'ici là. Les négociations sur la formation du gouvernement ont donné lieu à un bras de fer entre le président Kaïs Saïed et le parti d'inspiration islamiste Ennahdha, qui ont finalement trouvé un accord, mercredi soir, ce qui devrait écarter le spectre de nouvelles élections. Après l'échec en janvier d'un gouvernement constitué sous la houlette d'Ennahdha, le parti de Rached Ghannouchi, qui avait initialement désavoué la composition du gouvernement présenté samedi soir par M. Fakhfakh, s'est finalement engagé à soutenir ce cabinet. Ce soutien ouvre la voie à son approbation par le Parlement, où Ennahdha dispose du principal contingent (54 députés sur 217). Des négociations intenses ont continué jusqu'à la dernière minute, appelant à la rescousse la puissante centrale syndicale UGTT -un médiateur historique depuis la révolution, ainsi que l'organisation patronale Utica. «La période des concertations, malgré ses difficultés et sa complexité, s'est déroulée de façon tout à fait démocratique», a souligné Fakhfakh dans une déclaration télévisée tard mercredi. Alors qu'Ennahdha avait soutenu Kaïs Saïed au second tour de la présidentielle, ces négociations ont mis à jour de profondes divergences entre les deux principaux acteurs. Néophyte en politique mais élu en octobre dernier avec un très confortable score, le président Saïed est un spécialiste du droit constitutionnel, très critique du système parlementaire partisan. Il défend avec constance des principes, dont une décentralisation radicale du pouvoir. Rached Ghannouchi, lui, est une figure de la classe politique aux commandes depuis la révolution de 2011, qui a vu son poids électoral s'éroder, même s'il demeure la principale force du pays. Très pragmatique, il a accédé à la présidence de l'Assemblée (ARP) à la faveur d'une alliance avec son principal adversaire électoral, Qalb Tounes, mené par le sulfureux magnat des médias Nabil Karoui. Saluée lors de son adoption en 2014 comme une avancée majeure sur le chemin de la démocratie, la Constitution a donné naissance à un régime hybride, ni parlementaire ni présidentiel, prompt à ce type de blocage. Et si Ennahdha a obtenu sept ministères dans la nouvelle proposition du gouvernement, il n'a pas eu ceux escomptés, notamment l'Intérieur et la Justice. Le parti a justifié mercredi soir sa décision de soutenir ce gouvernement par la nécessité de prendre «en considération la situation économique et sociale» du pays et le conflit en Libye voisine, nécessitant de former un gouvernement rapidement.