Une justice à deux vitesses qui a fait réagir les victimes du terrorisme, lors de leur IIIe congrès. Un groupe de magistrats algériens est attendu très prochainement à Londres. Selon une source sûre, qui d'ailleurs ne fait que confirmer la déclaration du ministre britannique des Affaires étrangères, cette visite examinera sous toutes ses coutures la coopération judiciaire entre Londres et Alger. Son objectif, prendre langue avec leurs homologues britanniques autour des modalités d'extradition d'activistes algériens condamnés par contumace. Une procédure, qui, toutefois, doit obéir à une batterie de mesures auxquelles l'Algérie doit souscrire. Il s'agit, entre autres de la consécration du droit à la défense des personnes extradées et du respect de leur «dignité». Il convient de rappeler dans ce cadre, que lors d'un point de presse tenu à l'issue de sa visite en Algérie, le chef de la diplomatie britannique, Jack Straw avait indiqué que toute extradition ne dépend pas d'un accord ou autre convention entre deux pays. Avant de poursuivre que cette procédure doit obéir aux engagements internationaux du Royaume-Uni. Pourtant, au lendemain de la série d'attentats qui avait ébranlé l'année dernière Londres, le premier ministre britannique Tony Blair avait pris une série de mesures, en fixant de nouvelles conditions d'immigration au Royaume-Uni. La dernière adoption par le Parlement d'une loi interdisant l'apologie du terrorisme, a pour objectif de lutter efficacement contre les extrémismes. Ainsi les autorités britanniques se sont rendues compte après des décennies de laxisme et de complaisance affichés à l'égard des groupes islamistes, que les attentats de Londres ne sont que l'effet boomerang de cette même permissivité. Par ailleurs, comment peut-on expliquer le refus des autorités britanniques d'extrader les islamistes algériens, alors que des islamistes recherchés dans les autres pays européens et aux Etats-Unis sont extradés, aussitôt la demande introduite par ces pays. C'est le cas de la décision de la justice britannique d'extrader vers l'Espagne, le 14 du mois en cours, du Tunisien Hedi Benyoucef Boudhiba, détenu à Londres et soupçonné de participer au financement d'Al Qaîda. Un deux poids, deux mesures justifié par les magistrats londoniens par le fait que «L'Espagne est un pays civilisé. Nous avons des preuves qu'en cas d'extradition, une évaluation convenable sera faite afin d'établir si (l'accusé) est en état d'être jugé » Pis, les juges de la Haute Cour de Londres n'ont pas hésité à rejeter les raisons médicales invoquées par les avocats du suspect en estimant que la défense pourrait faire valoir ces arguments en Espagne. A noter que cette justice à deux vitesses a fait réagir les victimes du terrorisme, qui lors de leur IIIe congrès tenu le 13 de ce mois en Espagne, ont souhaité la mise en place d'une batterie de mesures antiterroristes d'ambition mondiale: «La coopération et l'harmonisation des politiques de prévention, la répression et lutte contre le financement du terrorisme, la refonte des procédures d'extradition en matière de terrorisme, (avec) la livraison immédiate des terroristes à l'Etat où ont été commis les crimes», figurent parmi leurs recommandations. Ainsi, aux yeux des juges londoniens la justice algérienne n'est-elle pas en mesure de juger les personnes recherchées conformément à la loi et à ses engagements internationaux? D'autant plus que la Charte pour la paix et la réconciliation nationale adoptée par le peuple algérien, permet même aux groupes terroristes armés dont les mains ne sont pas tachées de sang de bénéficier d'une amnistie. L'attitude somme toute incompréhensible de Londres, celle de prétendre combattre le terrorisme d'une part, et de tergiverser sur le dossier des extraditions de l'autre, dénote un double jeu, qui, en fin de compte, ne ferait que se retourner contre ses propres auteurs.