Le gouvernement Blair exige qu'un magistrat britannique supervise les procès pour s'enquérir de leur équité et du respect des droits fondamentaux des jugés. “Beaucoup de progrès ont été accomplis sur la voie de la conclusion du traité d'extradition. Nous souhaitons le signer le plus tôt possible”, assurait Jack Straw en février dernier. Le chef du Foreign Office divulguait ses intentions lors de son déplacement à Alger. Presque à la même période, le ministre algérien de la justice, Tayeb Belaïz, annonçait que les différents traités, judiciaire et commercial notamment, en négociation avec les autorités britanniques “sont en voie de finalisation”. Fermes et optimistes, les deux déclarations laissaient penser que la ratification est une question de temps et non de volonté et ne serait guère ajournée par la perduration de quelconques divergences. Des dissemblances existent pourtant. Si Londres a décidé de se défaire des activistes et des terroristes islamistes présents sur son sol, elle n'entend guère les livrer comme une bouteille à la mer. “Nous devons être assurés que les droits de l'homme seront respectés”, réclamait en substance Kim Howells, secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, en visite dans notre pays l'été dernier. Une exigence qui, tout naturellement, a heurté le gouvernement algérien. La confirmation est venue de Rabah Toubal, responsable de la presse au siège de notre ambassade à Londres. “Nous étions très proches d'un accord. lorsque nos représentants sont venus ici en novembre, ils étaient convaincus qu'ils allaient signer, mais ils ont été surpris par ces garanties. Quelles garanties ? Nous n'en avons jamais parlé”, révélait-il vendredi soir, au cours d'une émission sur la chaîne de télévision Channel Four. Selon lui, ces garanties ont été posées par les britanniques “à la dernière étape d'une longue négociation”. Poussant son droit de regard à l'extrême sur la gestion du sort des expulsés, le gouvernement Blair demande à ce que leur jugement soit contrôlé par un magistrat britannique avec comme objectif de s'assurer que les procès sont équitables et le traitement des détenus conforme aux principes des droits de l'Homme. “Lorsque vous acceptez qu'un magistrat étranger vienne surveiller votre propre juge, cela veut dire que vous le placez au-dessus de votre propre justice et cela est réellement inacceptable”, s'est offusqué le diplomate algérien. Scandalisé, il soutiendra qu'en Algérie : “Nous avons notre constitution, nos lois, notre justice. Nous avons nos médias et notre société civile. Nous avons signé les conventions internationales sur les droits de l'Homme.” Manifestement, “le caprice” britannique n'a pas été du goût des autorités algériennes. “S'ils ne nous font pas confiance, qu'ils les gardent (les terroristes NDLR). Nous n'avons jamais demandé à avoir ces gens. Nous n'avons jamais demandé à ce que ces gens reviennent en Algérie. Ce sont les britanniques qui pensent qu'ils constituent un risque pour votre sécurité et ils devraient les extrader”, renchérit vertement M. Toubal. Actuellement, 17 algériens suspectés de terrorisme sont en prison ou sous contrôle judiciaire au Royaume-Uni. Beaucoup d'autres sont en liberté alors qu'ils sont accusés, ici, d'avoir financé les groupes terroristes ou d'avoir commandité ou cautionné leurs actions. Au cours des années 90, alors que l'Algérie était à feu et à sang, des islamistes ont trouvé refuge sur le territoire de Sa Majesté. Quelques-uns ont même réussi à obtenir le droit d'asile. Des tribunes publiques leur étaient offertes pour appeler au djihad en Algérie. Mais depuis les attentats de juillet dernier, ils sont devenus encombrants. Au lendemain de ces actions terroristes ayant ciblé les transports en commun, le Royaume-Uni a décidé de signer des accords d'extradition avec de nombreux pays. Des traités ont été signés avec la Jordanie, la Libye et le Liban. Selon le Foreign Office, tous ces Etats ont accepté un contrôle judiciaire indépendant du respect des droits fondamentaux des détenus. SAMIA LOKMANE