«Il est temps de mettre un terme au climat de suspicion et de malentendus qui règne.» Homme truculent et haut-en-couleur, qui , tout en condamnant les atteintes à la religion, défend bec et ongles la liberté de la presse, Bo Erich Weber, l'ambassadeur du Danemark en Algérie fait appel à la conscience et à la moralité des journalistes pour baliser eux-mêmes leurs libertés et maîtriser leurs débordements langagiers et satiriques. Dans ce bref entretien, il fait notamment un retour sur son entrevue avec le président du Haut conseil islamique, Cheikh Bouamrane. L'Expression: Deux mois après les premières turbulences générées par l'affaire des caricatures jugées blasphématoires par la communauté musulmane, où en êtes-vous? Bo Erich Weber: Je pense qu'il est temps que les choses se tassent et de commencer de travailler dans le sens de l'apaisement et la compréhension. Avec la presse, on peut au moins communiquer et dialoguer. Ceci étant, je pense que le dialogue s'instaurera, c'est inévitable. Il semble que vous avez mal accepté le compte rendu de votre entretien avec Cheikh Bouamrane. Pourquoi? Parce que j'estime ne pas être l'auteur des propos qu'il me prête. Il a déformé, il a reformulé à sa manière, de sorte que je ne me reconnais plus dans les propos qui me sont attribués. Au départ, je pensais que c'était là des extrapolations du journaliste, mais lorsque j'ai appelé, on m'a confirmé l'entretien. Que contestez-vous exactement? On me prête d'avoir dit que la communauté musulmane au Danemark est responsable des débordements de l'affaire. C'est faux. La communauté musulmane chez nous, estimée à 200.000 personnes, est bien intégrée, respectable et respectueuse. Elle n'a aucune responsabilité, dans sa globalité, dans les débordements pris par l'affaire des caricatures. Je conteste aussi le fait d'avoir dit que la liberté de la presse est sacrée. La liberté de la presse n'est pas sacrée, elle est constitutionnelle, c'est tout. Il se trouve qu'elle a sa place dans la Constitution danoise. Cela n'a rien de sacré. Bouamrane a dit que l'ambassadeur italien est meilleur diplomate que moi. Bon, c'est un avis, je n'ai pas à le contester, mais je suis certainement plus rapide en course que l'Italien. Moi, je fais quotidiennement du sport. Revenons aux caricatures. Que faut-il faire pour pénaliser de semblables blasphèmes? Il existe une commission d'éthique qui peut dire que tel article de presse est diffamatoire ou que telle caricature est insultante. Cette commission peut saisir les tribunaux, lesquels peuvent statuer et dire si les articles ou les caricatures sont en faute, et même éventuellement incriminer le journaliste. Nous avons constaté que le journal par qui le blasphème est arrivé, le Jullands Posten, a reçu un prix au Danemark pour son engagement en faveur de la liberté de la presse. Est-ce que cela veut dire que Copenhague persiste et signe? Non, non, je ne le pense pas. Regardez là, ce sont des journaux danois qui datent de cette semaine (il nous présente deux journaux danois à grand tirage ). Le Premier ministre Rasmusen dit ne tolérer aucune atteinte aux religions. Cela, c'est la règle à respecter. Si, maintenant, il se trouve des journalistes contrevenants, il faut trouver d'autres voies pour leur faire savoir qu'ils s'insinuent dans de fausses pistes.