Entre l'Algérie et le Maroc, la tension ne retombe pas. Les attaques récurrentes du voisin de l'Ouest ont exaspéré Alger qui même en favorisant le voisinage et les bonnes relations avec le peuple marocain, a fini par révéler au grand jour que le royaume n'a pas trouvé mieux que d'envoyer un officier des renseignements dans les habits d'un diplomate. En divulguant la vraie fonction du consul d'Oran à l'origine d'un grave dérapage verbal, Belaïd Mohand-Oussaïd, le porte-parole de la Présidence et ministre-conseiller à la Communication, a voulu véhiculer un message clair au Makhzen: l'Algérie n'est pas dupe de ce qui se trame derrière son dos ni sur son sol, mais si elle ferme sciemment les yeux sur certains agissements c'est parce qu'elle tient à préserver la bonne relation entre les deux peuples frères. «Dévêtir» publiquement un officier des renseignements n'a évidemment pas été du goût du royaume qui n'a pas tardé à réagir pour défendre son ex-«émissaire» à Alger. Dans une déclaration à l'agence officielle MAP, Nasser Bourita, ministre marocain des Affaires étrangères, a commencé par qualifier de «graves» les propos de Mohand-Oussaïd Belaïd avant de faire part de sa «consternation face à ces allégations émanant d'un représentant d'une institution censée faire preuve de discernement et de retenue». Et de poursuivre «le Maroc rejette ces assertions ridicules et sans fondement». Bourita soutient que «le consul général du Royaume à Oran est un cadre du ministère, justifiant d'une carrière longue de 28 ans, aussi bien au service central que dans plusieurs postes à l'étranger». Il souligne que c'est le royaume chérifien qui a décidé du «rappel immédiat» de son consul. «Le rappel du consul a été décidé à l'initiative exclusive du Maroc», a affirmé le chef de la diplomatie marocaine. Mohand-Oussaïd a pourtant été très clair «le consul du Maroc a quitté le territoire national à la demande de l'Algérie et son attitude a dépassé toutes les limites de la convenance. Son comportement était prévisible. Nous avons découvert que c'est un agent des services de renseignements marocains qui a été désigné consul à Oran pour d'autres raisons». Le département de Sabri Boukadoum, faut-il le rappeler, avait convoqué l'ambassadeur du Maroc à Alger pour lui signifier que la qualification de l'Algérie de «pays ennemi» «(...) requiert des autorités marocaines la prise des mesures appropriées pour éviter les répercussions de cet incident sur les relations bilatérales». Quelles autres mesures pouvait bien prendre le royaume que de rappeler son consul «gaffeur»? Il ne s'agissait sûrement pas de lui taper sur les doigts! En affirmant que c'est le Royaume chérifien qui a décidé seul du rappel de son consul, Nasser Bourita a voulu sauver les apparences car le dérapage de son émissaire est d'une gravité sans précédent! «Nous sommes dans un pays ennemi, je vous le dis franchement», avait déclaré le diplomate marocain. Face à des propos aussi provocateurs, malintentionnés, le Maroc avait tenté d'atténuer les lourdes conséquences qui pouvaient découler d'un pareil aveu en mettant en doute la véracité des propos attribués au consul malgré l'existence d'une vidéo filmant la séquence. C'est dire qu'ayant conscience de la gravité du dérapage, le royaume a tenté de s'accrocher comme à une ultime planche de salut, à un supposé trucage de la vidéo. Une vaine tentative visant à trouver un exutoire qui ne ruinerait pas la réputation du Makhzen devant son «ennemi» de l'Est. Il faut dire que le pays voisin a multiplié ces derniers temps, les déclarations hostiles envers l'Algérie. Outre les propos du consul, il y a eu une étude, oeuvre d'un think tank marocain, qui a considéré l'Algérie comme une menace permanente ou encore la construction en cours d'une base militaire d'écoute juste à la frontière avec l'Algérie. Il y a eu aussi les attaques de Bourita contre l'Algérie au 26ème Sommet des pays du Mouvement des non-alignés (MNA). Toutes ces attaques, sans cesse renouvelées par les autorités marocaines envers l'Algérie, ne feront que maintenir le froid diplomatique qui imprègne les relations algéro-marocaines, mais sont loin d'affecter les chaleureuses relations de fraternité et d'estime liant les deux peuples.