La région des Ath Douala, dans la wilaya de Tizi Ouzou, est incontestablement l'une des localités d'Algérie qui a donné le plus grand nombre de chanteurs au talent incontestable et dont certains ont marqué une ou plusieurs générations de mélomanes. Ath Douala est sans doute la terre des artistes. Car, en plus des figures célèbres de la chanson kabyle qui sont nées et qui ont vécu dans cette région, cette dernière compte également des centaines de chanteurs dont l'aura est certes modeste, mais qui sont néanmoins de vrais artistes au talent avéré. Ath Douala est la terre natale du Rebelle Matoub Lounès, mais aussi des grands chanteurs Chérif Hamani, Zedek Mouloud, Malika Domrane, Moh Smail, Matoub Hamid, Samy El Djazaïri et de tant d'autres voix ayant enrichi de manière considérable le répertoire de la chanson kabyle. En outre, il n'y a pratiquement aucun village de cette région, aussi petit soit-il, qui ne compte pas un ou plusieurs chanteurs. On dirait que la chanson court dans les veines de cette catégorie de la population. Il s'agit d'artistes dont le style musical est également presque le même, celui qu'on retrouve aussi bien chez Matoub que chez Chérif Hamani ou Zedek Mouloud, bien sûr avec des touches personnelles pour chacun d'eux. Importance du verbe et de la poésie Hormis dans le cas de la grande figure de la chanson féminine kabyle, Malika Domrane. Chez cette dernière, le style est plutôt moderne, même s'il demeure d'inspiration profondément traditionnelle. Tous ces artistes ont également pour point commun l'importance capitale accordée au verbe et à la poésie. Il s'agit d'artistes pour lesquels les textes poétiques sont prioritaires. Depuis leur premier album, ils ont tous pour dénominateur commun le fait d'avoir innové à chaque fois sur le plan textuel. Ce qui fait d'eux des poètes, parfois, plus qu'ils ne sont des chanteurs. C'est le cas plus particulièrement du trio de choc: Matoub-Hamani-Zedek, dont les textes poétiques sont d'une beauté lexicale et au style métaphorique prononcé qui émerveille le mélomane, au-delà des supports musicaux qui sont également de véritables perles. Les artistes des Ath Douala, qu'ils soient du village Taourirt Moussa, Tizi Hibel, Tagragra, Ath Khalfoun, Ath Bouyahia ou autres, ont le mérite d'avoir apporté un plus non négligeable aussi bien à la poésie kabyle qu'à la chanson de la même langue. Un apport de qualité Quand on sait que ces artistes ont produit chacun des dizaines d'albums de haute qualité, on devine aisément leur apport. Quant aux artistes talentueux de la même région qui sont malheureusement méconnus aujourd'hui, ils se comptent par centaines. Déjà, dans la famille de Matoub Lounès et dans son entourage immédiat, on compte des dizaines d'artistes auteurs de chansons très célèbres chantées, notamment dans les fêtes, mais aussi interprétées par de grands artistes dont Matoub, lui-même. On dit par exemple que la célèbre chanson de fête «Ahya tilawine», contenue dans le premier album de Matoub serait l'oeuvre du regretté Tilwa, très connu dans les milieux artistiques d'Ath Douala. Il semblerait aussi qu'une autre chanson célèbre du Rebelle ait été composée par l'un de ses oncles paternels, un artiste talentueux, mais qui n'a pas entrepris une carrière d'artiste professionnel. Quand on baigne dans un tel environnement artistique, on ne peut qu'avoir des prédispositions à devenir un chanteur un jour. C'est ce qui est arrivé à ces enfants d'Ath Douala où sont aussi nés Mouloud Feraoun, Imache Amar et Fadhma Ath Mansour Amrouche, mère de Taos et de Jean Amrouche. Ath Douala, terre des écrivains aussi.