Mauvaise humeur, indifférence? Une fois encore, des responsables arabes font défaut. Depuis le sommet de Beyrouth, il a été beaucoup question de réformes et de redynamisation de la Ligue arabe afin de lui redonner un crédit et une pugnacité depuis longtemps perdus. Il semble que les engagements de ces dernières années -afin de faire de la Ligue arabe une organisation représentative et capable de jouer le rôle pour laquelle elle a été créée- ne soient, tout compte fait, que des promesses. Sinon, comment expliquer ces absences répétées des monarques et chefs d'Etat arabes au rendez-vous annuel des pays arabes? De fait, selon les agences de presse et les médias arabes, il a été comptabilisé hier huit chefs d'Etat et de gouvernement qui, pour une raison ou une autre, ont décidé de faire l'impasse sur le sommet de la Ligue arabe dont les travaux s'ouvrent aujourd'hui à Khartoum. Ainsi, le sommet prévu pour aujourd'hui et demain s'est réduit, au vu de l'absence de près de la moitié des dirigeants arabes, à la seule journée d'ouverture. Peut-on dès lors parler du sérieux des Arabes, lorsque des chefs d'Etat ou monarques influents, ou considérés comme tels -à l'instar du président égyptien Hosni Moubarak, et des monarques saoudien, Abdallah Ben Abdelaziz et marocain, Mohammed VI- se font porter pâles à une réunion arabe de premier plan de laquelle il était attendu beaucoup? En réalité, la répétition de ces absences - injustifiées quelles qu'en soient les raisons ou circonstances - focalise les commentaires des médias, enlevant tout intérêt aux thèmes et dossiers - pourtant importants - des sommets arabes qui se suivent et se ressemblent par leur incohérence, en donnant à voir le peu de sérieux des dirigeants desquels il était attendu qu'ils montrent l'exemple. Est-il étonnant dès lors que les Arabes demeurent en déficit de crédit sur la scène internationale et ne parviennent pas à se faire écouter et, partant, à défendre des dossiers arabes récurrents tel celui de la Palestine, ouvert depuis 60 ans, dans lequel les Arabes ne semblent pas devoir, à jamais, avoir droit de chapitre. Comment en effet pouvait-il en être autrement lorsque les pays arabes - dont nombreux sont dominés par des dictatures qui ne voient pas plus loin que la consolidation de pouvoirs desquels les peuples arabes sont exclus - ont fait le choix de l'immobilisme, et se sont figés dans des croyances et attitudes que les bouleversements qu'à connus le monde ces quinze dernières années ne sont pas parvenus à éroder ou à remettre en cause. De fait, les dirigeants arabes qui n'ont pas de compte à rendre à leurs peuples respectifs, n'estiment pas devoir faire l'effort, minimum, de se montrer vraisemblables aux yeux du monde. Et ce ne sont pas les absences récurrentes des responsables arabes à leur sommet annuel qui vont améliorer l'opinion que la communauté internationale a des Arabes en général, de leurs dirigeants en particulier. Aussi, quelle portée peut avoir un sommet arabe déserté par une partie de ses pairs? Pourtant la question des réformes de la Ligue arabe nécessaires, et incontournables -pour toute politique arabe ambitieuse dans un monde en constante évolution- ne peut se faire au rabais et en l'absence de quelques-uns de ses membres les plus à même de donner à l'organisation arabe force et crédit. De fait, les vrais problèmes de fond induits par les réformes projetées, seulement effleurés, n'ont jamais été abordés de front dont la cruciale et fondamentale délégation de pouvoir tant à la Ligue qu'à ses démembrements tels le Parlement arabe, la Cour arabe de justice, le Conseil arabe de prévention et de sécurité dépourvus de prérogatives -à même de leur donner d'agir efficacement- apparaissent déjà comme des coquilles vides, avant même leur naissance officielle. Aussi, il ne sert à rien en effet, de faire du mimétisme en créant des organismes -similaires à ceux existants dans d'autres organisations régionales, telle l'Union européenne- budgétivores mais sans impact sur la réalité du vécu du monde arabe. Et ce sont ces ‘'petits détails'' -qui ont, en fait, des incidences profondes sur le fonctionnement de la Ligue arabe- qui ne peuvent être discutés sérieusement, lorsque des chefs d'Etat, faisant l'impasse sur les sommets de la Ligue arabe, préfèrent rester chez eux gelant ainsi, de fait, toute avancée du monde arabe vers une meilleure prise en charge de ses affaires et de ses problèmes.