Oued Tlelat peut signifier un point de non-arrivée plutôt que de non-retour dans les relations régionales. Dialogue entendu dans un monde parallèle. L'union du Maghreb arabe, c'est par où? Suivez la flèche et arrêtez-vous à la gare de Oued Tletat. Traduction : on sait où finit l'UMA mais on ignore où elle commence. Le visa est supprimé entre l'Algérie et le Maroc, mais les frontières sont toujours fermées. Les hommes d'affaires tracent des plans sur la comète pour lancer, à l'initiative de Djillali Mehri, qui recevait ses hôtes à El Oued Souf, une chaîne de télévision maghrébine émettant à partir de nulle part (peut-être à partir de Chypre ou de Malte). Les universitaires signent des pétitions pour la relance de la dynamique unitaire, sans que cela émeuve les hommes politiques. Les intellectuels ne sont que de fieffés rêveurs. En diverses circonstances, le ministre algérien des Travaux publics, Amar Ghoul, annonce que l'autoroute Est-Ouest, dont les travaux devront être achevés en 2008-2009, aura ses prolongements au Maroc et en Tunisie. Et nous apprenons enfin que la Société nationale des transports ferroviaires (Sntf) a lancé un appel d'offres pour la modernisation et l'électrification de la ligne ferroviaire Oued-Tlelat/frontière marocaine, un tronçon entrant dans le cadre du Transmaghreb et visant le raccordement des réseaux ferroviaires des trois pays maghrébins (Algérie, Tunisie et Maroc). Pendant ce temps, c'est entre deux sommets de la Ligue arabe, seulement, que les dirigeants maghrébins se rencontrent en marge ou bien, comme c'est le cas pour celui de Khartoum, évitent de se voir pour se contenter de s'envoyer des missives, le dernier message adressé par le souverain marocain Mohammed VI au chef de l'Etat algérien Bouteflika faisant foi. De ce fait, la gare de Oued Tlelat n'est pas un simple point à l'horizon, un puits pour se désaltérer, une halte pour se reposer et reprendre des forces. Elle est le symbole même de l'échec de la construction maghrébine, le symbole de l'entêtement des dirigeants maghrébins à vouloir se tourner le dos. Une construction unitaire tête-bêche. Après Zoudj-Bghal, qui a abrité la rencontre entre Chadli et Hassan II, c'est Oued Tlelat qui prend la relève pour signifier un point de non-arrivée plutôt que de non-retour, voire de carrefour d'échanges, dans les relations régionales. Après le rêve inachevé du Maghreb des peuples, celui irréalisé de la société civile, voilà que pointe du nez le Maghreb des camions et des locomotives. C'est le Maghreb des transports, à défaut d'être celui des transporteurs. C'est-à-dire qu'on aura les rails et les routes, mais que les frontières resteront fermées. Des voies de communication désespérément vides. Le Maghreb des financiers s'est lui réuni dernièrement à Tunis et une banque d'affaires marocaine annonce sa prochaine implantation en Algérie. Le chef du gouvernement algérien Ahmed Ouyahia dut reporter ou plutôt annuler sa visite à Rabat en 2005. Il s'est rattrapé en se rendant à Nouakchott en Mauritanie. L'escale de Oued Tlelat n'a pas figuré dans l'itinéraire emprunté. Entre les trois pays existe un grand couloir pour l'écoulement des marchandises taïwan et pour la circulation des contrebandiers, mais interdit d'accès aux gens qui suivent la voie normale.