pour les observateurs, le ministre français aura surtout pour mission d'effacer le fâcheux épisode de la loi du 23 février sur le rôle positif de la colonisation. A l'invitation de Mohamed Bédjaoui, ,le ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, entame aujourd'hui une visite officielle de deux jours à Alger accompagné d'une forte délégation et de nombreux journaliste, dont Jean-Pierre El Kabbach d'Europe 1, «un ami du président Bouteflika», dit-on. Depuis des mois, ce voyage revenait dans les discussions sur les relations entre les deux pays, mais Alger n'arrivait pas à trouver «une possibilité dans son calendrier», selon des sources diplomatiques. Cette première visite de Douste-Blazy s'inscrit donc officiellement dans «le contexte de l'approfondissement de nos relations avec l'Algérie dans tous les domaines», comme il le précise lui-même. Il n'empêche que, pour les observateurs, le ministre français aura surtout pour mission d'effacer le fâcheux épisode de la loi du 23 février sur le rôle positif de la colonisation. Dans un récent entretien à l'APS, il avait, certes, déclaré que «cette histoire est derrière nous», mais il lui faudra certainement davantage pour convaincre ses interlocuteurs algériens qu'il n'y aura «plus d'entourloupe française» «sur la voie» du traité d'amitié. Ce traité, ou du moins son projet, lancé sur les chapeaux de roues par les deux présidents Bouteflika et Chirac, a depuis, marqué le pas en raison de la loi du 23 février, notamment. Le retrait de l'article controversé en janvier dernier a dégagé quelque peu l'horizon du traité. Dans son message du 22 mars, le président Jacques Chirac avait exprimé son souhait de «s'entretenir dès que possible» avec le président Abdelaziz Bouteflika pour étudier «la façon de mener à bonne fin» le traité. Il faut dire que pour le président français, la réussite de ce projet est importante pour rattraper ses déboires intérieurs dont le moindre n'est pas le très contesté CPE (contrat de première embauche ) initié par son Premier ministre Dominique de Villepin. On peut toutefois croire qu'après une longue période de froid, «les relations devraient désormais reprendre leur cours normal» selon les propos du ministre algérien des Affaires étrangères en mars dernier. Phillipe Douste-Blazy aura donc pour principale tâche de convaincre ses interlocuteurs d'une volonté réelle de reprise du processus. Il ne faudra pas en attendre davantage en termes d'annonce du moins. Dans son entourage, à Paris, on s'applique d'abord à le dédouaner de l'affaire de la loi du 23 février d'une part, et de préciser qu'il est l'émissaire, en quelque sorte, du président Chirac qui tient particulièrement à conclure le traité. Au plan politique, ce dernier point se taillera la part du lion. Il sera question évidemment de la coopération bilatérale dans différents domaines et de la situation dans la région. Point de surprise à attendre de ce côté-là non plus. Pour exemple, la question sahraouie sur laquelle Douste-Blazy soutiendra selon ses proches «les résolutions de l'ONU et rien d'autre». Au niveau économique, le ministre plaidera la cause des sociétés françaises, déjà en course, dans le secteur du réseau routier avec le projet d'autoroutes, le rail et le bâtiment. Mais cette visite, bien entendu, ne vaudra que par la rencontre avec le président Bouteflika. A telle enseigne que dans le microcosme médiatico-politique parisien, des rumeurs ont couru, à la veille du voyage ministériel, sur le risque d'un refus du président algérien de rencontrer le chef de la diplomatie française. C'est dire que la partie de la réconciliation post-loi du 23 février n'est pas gagnée. D'autant que le traité d'amitié ne règlera pas l'épineuse question des visas et de la circulation des personnes puisque la France invoque à ce propos les accords de Schengen et son appartenance européenne. Mais le projet reste tout de même ambitieux et si les deux parties le mènent à bien, il leur ouvrira sans nul doute de nouvelles perspectives de coopération. Un partenariat d'exception, en somme, comme l'a souhaité le président Chirac.