De toutes les luttes politiques menées en Algérie après l'indépendance, c'est incontestablement le combat identitaire qui a été le plus abouti. Pacifiquement, une génération d'Algériens a mené un noble combat. Point culminant de cette lutte, le mouvement berbère d'avril 1980 a eu cette particularité de naître sur les bancs de l'université avant d'irradier toute la société. Les graines, semées au Printemps amazigh, ont fini par germer. Malgré les embûches, les convulsions et les déceptions, il a été le prélude à d'autres expressions populaires en 1982, 1986, 1988, 2001 et 2011 pour aboutir au formidable bouleversement de février 2019. Depuis le début du Mouvement national au milieu des années 1920, une tendance lourde, orientée vers l'Orient, pour des raisons idéologiques et historiques, a voulu insérer l'Algérie dans un moule identitaire sommaire: la oumma arabo-islamique. Le greffon n'a jamais pris tant il lui manquait la racine principale: le caractère amazigh de l'Algérie et c'est la cause même de la crise au sein du PPA-Mtld, dite crise berbériste de 1949. Pour autant, le coeur identitaire de l'Algérie millénaire n'a jamais cessé de battre. Plus de 30 ans après cette crise dite «berbériste», on assiste, le 20 avril 1980 en Kabylie, à l'acte inaugural de la réappropriation identitaire. Qui oserait, sous la chape du parti unique, aborder la question identitaire en Algérie? De jeunes militants ont confronté leurs convictions avec le totalitarisme de l'époque. Ainsi, pour faire admettre que la réalité sociolinguistique dans notre pays est plurielle, il a fallu un combat de toute une génération au péril de sa carrière professionnelle, de sa réputation et souvent même de sa vie. Que de manipulations, que de quolibets, que d'accusations n'a-t-on pas lus et entendus à propos des défenseurs de la langue, de l'histoire et de la culture amazighes. Des manipulés de l'étranger au service de la CIA, des brûleurs de l'emblème national et du Coran...etc. Pour assister ensuite en direct à la télévision aux harangues endiablées de ces députés, gardiens du temple vociférant en guise de rappel à l'ordre des «égarés» du RCD, du FFS ou du PT qui s'exprimaient en tamazight au sein de l'Assemblée. On mesure, aujourd'hui, le chemin parcouru durant plus de 70 ans de lutte ininterrompue et pacifique. Le combat clairement affiché pour l'amazighité de l'Algérie remonte en effet à 1949. Aujourd'hui, tamazight est langue nationale et officielle, Yennayer, coïncidant avec le 12 janvier de chaque année est consacré journée chômée et l'Algérie renoue avec son histoire millénaire.