Le texte de loi tendant à faire de la journée du 19 Mars une date de commémoration de la fin de la Guerre d'Algérie a entraîné une ambiance électrique dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale française. Pendant que les députés «s'étripaient» en s'échangeant des insultes, dans les tribunes du public bourrées à craquer les nostalgiques ont beaucoup pleuré. Quarante ans après, la France traîne toujours ce torticolis qui l'empêche de regarder franchement son Histoire. Le même temps aura été nécessaire pour seulement apporter des touches au vocabulaire de cette période coloniale. Après avoir soutenu pendant longtemps que l'Algérie était traversée de 1954 à 1962 d'«événements», d'«oeuvre de pacification», ou de «maintien de l'ordre», le Parlement français a fini par admettre qu'il y a eu «Guerre d'Algérie». «C'est encore trop tôt», a lancé le secrétaire d'Etat français aux anciens combattants lors des débats mardi dernier. C'est vrai que les politiques français sont divisés dès qu'il s'agit de l'Algérie. D'ailleurs, l'opposition au texte de loi y trouve ses arguments lorsqu'ils «refusent que les monuments aux morts soient le théâtre de manifestations». Quoi qu'il en soit, quelques responsables politiques français sont plus lucides, tel ce député qui a affirmé du haut de la tribune : «Le 19 Mars est une date que l'Histoire imposera de toute façon et nous n'y pouvons rien.» A l'évidence, se sera pour une autre fois car, malgré le vote à mains levée, le texte de loi a toutes les chances de ne pas passer le 22 janvier prochain lors du vote solennel. Au-delà de la question de savoir quand «l'exorcisme» aura lieu, il est utile de se pencher sur les raisons qui ont poussé les auteurs de la proposition de loi à agir maintenant. La France, qui entre dans une campagne électorale pour la présidence de la République, est une première explication. Surtout que les législatives suivront juste après. C'est ce qui a fait réagir un député français qui a déclaré: «La Guerre d'Algérie n'est pas un fonds de commerce», après avoir taxé «le 19 Mars (de) serpent de mer qui réapparaît à quelques mois des élections».Ce débat franco-français laisse songeur sur la rive-sud de la Méditerranée où les dates et les faits sont en accord harmonieux. C'est l'agresseur qui a mauvaise conscience tout en s'efforçant de sauver les apparences. Mais rien n'y fera.