Le ministère de l'Intérieur vient d'annoncer des poursuites judiciaires à l'égard de 230 agents de la protection civile, suite aux actions de Protestation observées dans la capitale, avant-hier. Simultanément, la direction générale de la protection civile, quant à elle, annonce «la suspension de ces 230 agents». Les procédures de suspension et de poursuites judiciaires à l'encontre de ces 230 agents ont été prises, «conformément aux dispositions de l'article 173 du statut général de le Fonction publique». À cet effet, le département de Beldjoud exhibe l'article 43 de la loi 02-90 relative à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l'exercice du droit de grève, ainsi que l'article 23 du statut particulier des fonctionnaires relevant des corps de la Protection civile. En clair, étant un corps constitué et paramilitaire, les pompiers n'ont pas le droit de manifester de la sorte. La réaction des pouvoirs publics, jugée disproportionnée, est motivée par «des renseignements avérés» de manipulations outrancières. Beldjoud n'y est pas allé avec le dos de la cuillère, en qualifiant le mouvement de protestation d'être «à la solde de parties et d'agendas haineux à l'égard de l'Algérie». Peu avant, le ministère de l'intérieur avait enjoint aux protestataires à cesser «définitivement ce mouvement...strictement inadmissible». Pour sa part, la direction générale de la Protection civile Dgpc a tenu des propos nuancés appelant les grévistes «à faire montre de discipline et de sens élevé de responsabilité, reconnus aux enfants du secteur et à ne pas céder aux publications subversives visant à semer la confusion et le chaos et à attenter à la stabilité de la patrie». Et de rassurer «toutes les revendications de ses agents, inscrites dans le Statut particulier et exprimées lors de sit-in de protestation, seront satisfaites dès l'examen des statuts». La Dgpc affirme, par ailleurs, que toutes les préoccupations exprimées par ses agents «ont été soumises aux autorités concernées et qu'une commission se penche sur leur examen». S'il est vrai que la réaction du ministère de l'Intérieur est dictée par un souci de préserver l'ordre public et la stabilité des institutions nationales, particulièrement en cette conjoncture difficile, elle ne devrait pas perdre de vue que la sagesse et la raison nous dictent de nous comporter avec doigté et finesse face à pareilles situations. Au demeurant, il y a visiblement comme un problème de communication dans ce nouvel épisode de la grogne sociale. D'un côté, le président de la République qui appelle ouvertement à ouvrir les canaux du dialogue avec les travailleurs et les partenaires sociaux, et de l'autre des responsables terrés dans leurs tanières attendant que l'orage passe. Conformément aux instructions du premier magistrat du pays, l'ère n'est pas à l'escalade, mais bien à l'apaisement des esprits. Et cela ne coûte pas beaucoup. Car, finalement, il faut situer les responsabilités et savoir à qui incombe la responsabilité de tels dérapages? Faut-t-il le rappeler, les actions de protestation des agents de la Protection civile ne datent pas d'avant-hier. Le mouvement avait été lancé le 25 avril dernier dans plusieurs wilayas et des plates-formes de revendications avaient été dispatchées et remises à qui de droit. Les revendications des agents de la Protection civile tournent essentiellement autour de la «prime de contagion», le «versement de la prime Covid-19», «ajustement des heures de travail supplémentaires», et «la mise en place d'un système de promotion en passant par le concours professionnel, tel que défini dans les statuts». Au même titre que l'armée blanche, les agents de la protection ont été et sont toujours aux avant-postes de la lutte contre la Covid-19 et dans les secours et les actions d'humanisme, qui leur ont valu, eux aussi, la sympathie de toute l'Algérie. Des circonstances atténuantes pourraient prévaloir dans toute prise de décisions quelconques, surtout s'il s'agit de sanctions, en ce mois de piété à l'égard d'une corporation au service de toute une nation.