C'est la question qui taraude les responsables palestiniens, à leur tête le président Abbas et le chef du gouvernement. Contraints et forcés par la réalité prévalant sur le terrain, le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, et le Premier ministre issu du Hamas, Ismaïl Haniyeh, doivent faite cause commune pour voir comment dépasser le spectre d'une tragédie humanitaire qui menace le peuple palestinien. De fait, c'est l'urgence de l'heure, face à la crise financière aiguë où se trouve plongée l'Autorité palestinienne -aggravée d'autre part par la crise politique- à laquelle la «communauté internationale» singulièrement l'Occident (Union européenne et Etats-Unis) a coupé les vivres en représailles -c'est le cas de le dire- de l'expression démocratique du peuple palestinien qui a choisi lors d'élections transparentes le Hamas pour diriger le gouvernement de l'Autorité palestinienne. Ainsi, l'Occident qui fait de la démocratie un passage obligé, n'en saura aucun gré aux Palestiniens qui ont fait montre d'un esprit égalitaire rare dans cette région du monde qui sont aujourd'hui collectivement punis par l'Occident pour s'être exprimés démocratiquement. Tous les problèmes qui assaillent les Palestiniens font suite aux élections législatives et les retombées, à tout le moins négatives, qu'elles ont entraînées. De fait, les dirigeants palestiniens sont quasiment impuissants, par leurs seuls moyens, à venir à bout d'une crise qui remet en cause tout ce qui a été fait ces dernières années pour donner au peuple palestinien d'ériger son Etat indépendant sur les territoires occupés en 1967. Mahmoud Abbas et Ismaïl Haniyeh ont pu constater, à leurs dépens, combien le peuple palestinien est bien seul dans une situation qui devait, aurait dû, mobiliser la solidarité arabe, autre que par la parole, pour venir en aide à un peuple mis dans la position inconfortable de devoir quémander ce qui lui revient de droit: le droit de vivre décemment, comme celui d'édifier son Etat indépendant. Ce qui fit dire au conseiller diplomatique et porte-parole du président palestinien, Nabil Abou Roudeïna, «Il est regrettable que les fonds ne soient pas arrivés. Nous sommes en discussion pour voir comment les faire parvenir» qui ajoute «La communauté internationale refuse de traiter avec nous tant que le gouvernement ne changera pas ses positions» insistant d'autre part sur le fait que ce sont les Palestiniens qui en «payent le prix». De fait, le président palestinien et le chef de gouvernement du Hamas, outre la crise financière, qui met au bord de la banqueroute l'Autorité palestinienne, ont encore à régler un différend politique aussi sérieux concernant la vision, apparemment inconciliable, qu'ont le Hamas et M.Abbas du devenir de l'Autorité palestinienne dont l'existence est le résultat de l'accord d'Oslo de 1993 entre l'OLP (Organisation de libération de la Palestine) et Israël, accord que le Hamas ne reconnaît pas et n'entend pas appliquer. Malgré ces positions divergentes, MM.Abbas et Haniyeh n'ont pas d'autre choix que de dialoguer ne serait-ce que pour voir comment dépasser le boycott international du Hamas. C'est dans cette intention que les deux hommes se sont rencontrés samedi mais la rencontre n'a donné lieu à aucune amorce d'un dénouement d'une situation qui pénalise fortement le peuple palestinien. C'est dans ce contexte difficile pour les Palestiniens que le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a pris l'initiative de convoquer pour demain à New York le Quartette (ONU, USA, Union européenne et Russie) pour discuter de la situation dans les territoires palestiniens occupés. Le Quartette, rappelle-t-on, est notamment à l'origine du plan de paix connu sous le nom de «Feuille de route» décidé en 2003 qui devait à «l'horizon 2005» donner naissance à l'Etat palestinien, vivant ‘'pacifiquement'' aux côtés d'Israël. Or, rien de tel ne fut et en 2006 on est plus que jamais loin de cet Etat palestinien perdu dans les brumes de la surenchère. La réunion de demain doit réunir autour de M.Annan, les ministres des Affaires étrangères des Etats-Unis, Condoleezza Rice, de Russie, Sergueï Lavrov et le Haut représentant diplomatique de l'Union européenne Javier Solana qui aborderont les divers aspects de la question palestinienne et voir comment résorber l'impasse actuelle. Mais il semble bien que les choses demeureront en l'état tant que les Etats-Unis et l'Union européenne, et partant Israël, ne prennent pas en compte la réalité sur le terrain, en dialoguant directement avec le Hamas qui se trouve être -fort du choix du peuple palestinien- la partie palestinienne la plus légitime pour négocier au nom des Palestiniens. Ce qu'affirment également nombre d'experts selon lesquels un accord de paix ne peut s'obtenir que si les Américains acceptent de dialoguer avec le mouvement islamiste. Ainsi, selon Henri Siegman, spécialiste du Proche-Orient au Council on Foreign Relations, le Hamas, qui respecte depuis un an une trêve auto-proclamée, est le «seul à disposer d'une légitimité suffisante» au sein de la population palestinienne pour assurer «le succès d'un éventuel accord de paix» avec les Israéliens indiquant: «Il est clair que si on veut vraiment mettre un terme à la violence, obtenir un accord de paix et placer les parties sur la voie de la paix, seul le Hamas le permettra». Certes, mais Israël, soutenu par les Etats-Unis, veut imposer sa paix aux Palestiniens et n'entend pas emprunter une voie aussi sensée, et la plus directe pour la paix, qui consiste à négocier avec les Palestiniens qui combattent l'Etat hébreu.