Le nouveau locataire du Quirinal sera investi demain. Ce dénouement fait au moins un heureux, le président sortant, Carlo Azeglio Ciampi, qui a déclaré: «Lundi, j'accueillerai le président Napolitano au Quirinal. Après quoi, je monterai en voiture et m'en irai à la maison. Finalement, après 7 années, la prochaine semaine, je dormirai dans ma maison.» Giorgio Napolitano, candidat de la Gauche plurielle a été élu, lors du premier scrutin à bulletins blancs par l'ensemble des Grands électeurs de «l'Union», le parti vainqueur de la XVe législature italienne. La séance ouverte lundi dernier, s'est terminée sans annonce. Ni vainqueur, ni vaincu en cette première mi-temps. Deux candidats étaient en lice pour le fauteuil de président de la République, Giorgio Napolitano représentant la coalition de la gauche unie et Gianni Letta, sous-secrétaire du gouvernement sortant, mis en avant par le patron de «Forza Italia», leader (contesté à mi-voix) de la «Casa delle Libertà» Silvio Berlusconi. La seconde partie, reprise dans la matinée de mardi, avec les «Grands votants» vêtus de leur plus beaux atouts, venus en nombre croissant sous la bannière de leurs partis, n'a apporté aucun résultat tangible. Chacun des deux camps est resté sur sa position tout en fortifiant sa défense, en attendant le contre-pied. Même un nul n'est pas permis, dès le moment où Gianni Letta est mis hors-jeu. Récapitulons les faits: Massimo d'Alema était le candidat choisi par les «Démocrates de la Sinistra», soutenu par l'ensemble des forces qui ont signé le programme gouvernemental de Romano Prodi, mais à une exception près celle de «La Rose au poing», parti politique mineur des socialistes de Boselli allié aux «radicaux» de Marco Pannella et Emma Bonino qui se sont démarqués du nom de d'Alema, pour ne pas le voter. Mais l'important n'est pas «La Rose...» comme dirait le poète, ni les radicaux. Le coup de fouet est venu de la droite, un «non» sec avec clairon, qui a fait dire au chef de file Berlusconi «si vous voulez d'Alema au Quirinal, on fera la grève aux impôts et on n'acceptera plus de payer les taxes, parce qu'on ne se sent pas représenté, si nous ne sommes pas dans les institutions (...). Nous ferons obstruction au Parlement». De là, ils ont proposé une rose de quatre noms: Mario Monti, Giuliano Amato, Lamberto Dini et Gianni Letta sur lesquels les deux mouvements devaient discuter et s'entendre, choisir ensemble le candidat qui normalement devait être voté de tous les «Grands électeurs» et atteindre le quorum des 2/3 prévu par la Constitution. Mais les jeux de la politique à l'italienne ne sont pas allés dans ce sens, la majorité gagnante des élections législatives avait un As dans sa manche, pour le substituer à d'Alema, cet As a un nom et un passé prestigieux dans la vie politique de la gauche communiste et post-communiste du pays, Giorgio Napolitano, ex-président de la chambre des députés (1992-1994), ex-ministre de l'Intérieur du premier gouvernement Prodi, ex-président de la Commission des affaires constitutionnelles du Parlement européen (1999-2004). Une vie entière comme parlementaire de la chambre, sa première élection de député remonte à 1953, un homme de grand profil institutionnel, pour ce Napolitain de 81 ans qui a été nommé sénateur à vie par l'actuel chef de l'Etat Ciampi, en 2005. La candidature de Napolitano, a suscité beaucoup de polémique, des dits et des non-dits, même si toute la droite reconnaissait en lui la stature de l'homme politique. Comme à son habitude, Berlusconi qui a mené avec obsession toute sa campagne sur sa litanie préférée: «Les communistes mangent les enfants», un jamais... au grand jamais, est venu s'adjoindre contre ce qu'il définit tout...mais jamais un communiste à la tête de l'Etat italien. Mur contre mur, un dialogue de sourds s'est établi entre vainqueurs et vaincus, mais comme l'histoire nous enseigne qu'en «politique, il ne faut jamais dire jamais», après le troisième scrutin de la présidentielle parti en fumée noire, la gauche s'est permis le luxe d'être Unie et de l'emporter aux prolongations, la quatrième votation a été remportée haut la main majoritairement avec 543 votes sur 1000 électeurs présents. Donc, Giorgio Napolitano devient le onzième président de la République et pour la première fois de son histoire l'Italie tourne le dos aux préjugés en élisant un ex-marxiste.