Le Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine s'est penché, ce jeudi, sur le dossier des frontières entre les Etats membres de l'UA. Le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, qui a représenté l'Algérie à cette réunion qui s'est tenue par visioconférence, a souligné les traités bilatéraux conclus avec tous les pays voisins. Et le dernier traité en date l'a été avec la République arabe sahraouie démocratique. On retiendra de l'allocution du chef de la diplomatie algérienne, «l'attachement de l'UA et de la plupart des pays membres à ce principe», rapporte un communiqué du ministère des Affaires étrangères. C'est dire que la problématique a déjà été abordée et l'écrasante majorité des pays du continent a souscrit à ce principe onusien. Et ce sont les pères fondateurs de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) en 1964 qui en avaient admis la justesse, avant que beaucoup de pays n'aient obtenu leurs indépendances. L'intangibilité des frontières héritées aux indépendances a figuré dans l'acte constitutif de l'UA. Rappelant ce fait historique, qui a fait éviter beaucoup de crises aux premières années des indépendances, Lamamra a estimé nécessaire son «application rigoureuse». Remettre en cause ce principe, reviendrait à hypothéquer la paix au sein du continent noir. Les conséquences sur la sécurité et la stabilité seront incalculables. Cela ne pourra objectivement pas être envisagé dans un contexte qui voit les pays africains fonder beaucoup d'espoir dans la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). L'argument du ministre est tout à fait opportun, au sens où l'Afrique dispose d'un mécanisme existant depuis 1964 qu'il suffirait d'appliquer pour véritablement accéder à l'émergence économique. C'est pourquoi, le chef de la diplomatie algérienne a «appelé à accélérer la cadence de la démarcation des frontières des Etats membres». Pour Lamamra, c'est là une «étape cruciale pour la prévention des conflits». Des accords bilatéraux de traçage des frontières, sur la base du principe de l'OUA jouera en faveur de «l'intensification de la coopération dans les zones frontalières», estime, à juste titre, le ministre des Affaires étrangères, non sans manquer de souligner les gains en matière de lutte contre «les fléaux actuels à savoir le terrorisme, les réseaux de traite des êtres humains et de trafic de drogues». L'exemple du conflit frontalier entre deux Etats membres de l'Union africaine, que sont le Maroc et le Sahara occidental, est édifiant de ce qu'il ne faut pas faire pour sortir le continent du sous-développement qui le mine. Le refus du Maroc de reconnaître la frontière qu'il partage avec le Sahara occidental, malgré les résolutions de l'Onu et le principe adopté par l'OUA en 1964, pourrit l'atmosphère dans la région et permet aux criminels en tout genre de squatter tout le Sahel. Dernier dossier de décolonisation du continent à être encore pendant au niveau des instances internationales, la question sahraouie empoisonne l'atmosphère, empêche le développement de l'Union du Maghreb et paralysera, à n'en pas douter, la Zlecaf. Il est, en effet, impossible d'imaginer une intégration économique généralisée avec un «abcès» au nord-ouest du continent. Les propos de Lamamra trouvent ainsi toute leur pertinence et les pays africains qui souhaitent réussir leur émergence devront impérativement tous régler leur problème de frontières. Et penser, ne serait-ce qu'une seconde, que cela se fera sur le dos du peuple sahraoui, ce serait fouler aux pieds un principe sacré et fondateur de l'UA. C'est dire l'urgence pour l'Union africaine de prendre sérieusement en charge cette question précisément. Le plaidoyer du chef de la diplomatie algérienne a fait son effet au sein du CPS de l'UA, puisque cette instance suprême de l'organisation panafricaine «a adopté à l'unanimité une résolution reprenant les propositions de Ramtane Lamamra portant sur l'impérative consécration du principe d'intangibilité des frontières héritées à l'indépendance», rapporte le même communiqué. Lequel rappelle que la résolution algérienne est accompagnée par la proposition de «constitution d'une unité chargée par le programme des frontières», dont la mission sera «de contribuer au soutien des efforts de règlement des différends frontaliers localement.» Loin de bloquer le processus d'intégration économique, l'approche algérienne met les Africains devant leur responsabilité historique face à plus d'un milliard de citoyens qui espèrent sortir de la misère. L'attitude du Maroc est l'un des principaux freins au développement futur du Continent.