Le général Abdel Fattah al-Burhane, à la tête du Conseil souverain qui dirige la transition au Soudan, a promis dimanche de réformer l'institution militaire et nié toute implication de l'armée dans le putsch manqué du 22 septembre. Après la tentative de coup d'Etat, au moins 11 officiers ainsi que des civils ont été arrêtés et le Premier ministre civil Abdallah Hamdok a appelé à une réforme de l'armée, sujet hautement sensible au Soudan.»Nous allons réorganiser les forces armées (...) Toute activité partisane est interdite» en leur sein, a affirmé dimanche le général Burhane qui inaugurait un hôpital militaire au sud de Khartoum. Il a assuré que les forces armées étaient «les plus engagées» pour la «transition démocratique». L'institution militaire est «engagée à tenir les élections à la date fixée pour la fin de la transition», prévue en 2023, a-t-il encore dit. Ensuite l'armée «quittera la scène politique, et son rôle se limitera à protéger le pays», a-t-il promis. Les militaires présents au sein du Conseil souverain, qui chapeaute la transition avec un gouvernement civil, sont censés remettre sous six mois aux civils les rênes de cet organe, qui devra alors organiser les élections en 2023. Mais, assurent les experts, les fractures sont profondes entre civils et militaires et le camp civil lui-même est divisé. Si «les forces armées ne mèneront jamais un coup d'Etat contre la révolution», le mouvement populaire qui a mené en avril 2019 à la destitution de l'autocrate Omar el-Béchir, «certaines personnes ne veulent pas d'élections ni de transition», a accusé le général Burhane, sans préciser son propos. Lors d'une réunion dimanche soir avec de hauts responsables militaires, il a qualifié de pure «calomnie» les accusations portées contre l'armée après la tentative putschiste. «Ce sont les forces armées qui ont fait échouer la tentative de putsch», a-t-il insisté. Le 22 septembre, le général Mohamed Hamdan Daglo, numéro deux du Conseil souverain, avait fait porter la responsabilité de la tentative de coup d'Etat aux «politiciens» qu'il a accusés d'avoir causé un «mécontentement» populaire et dressé ainsi la population contre les autorités militaires. En face, des manifestants, notamment dans l'Est, étaient sortis dans les rues pour dire: «Non au pouvoir militaire!» et «Non au coup d'Etat!». Cette tentative de coup d'Etat n'est pas la première dans un pays qui a été dirigé pendant 30 ans par Omar el-Béchir, arrivé lui-même au pouvoir par un putsch en 1989. Les exportations de pétrole en provenance du Sud-Soudan vont pouvoir reprendre via le port soudanais de Bashayer, après un accord avec les manifestants qui le bloquaient, a annoncé Khartoum dimanche soir. «La réunion entre la délégation gouvernementale dirigée par le général Kabashi, membre du Conseil de souveraineté, et une délégation du Conseil Beja a abouti à un accord autorisant le passage des exportations pétrolières sud-soudanaises par le port de Bashayer», a déclaré le Conseil de souveraineté de Khartoum, un organe militaro-civil qui chapeaute la transition avec le gouvernement civil. Bashayer est le principal terminal, proche de Port-Soudan, à partir duquel le pétrole du Sud-Soudan, un pays enclavé, est expédié vers les marchés mondiaux. Dans cette région pauvre par laquelle transite pourtant la majeure partie du commerce de ce pays, les protestataires dénoncent un accord de paix avec des rebelles qui «ne leur assure pas une représentativité suffisante au sein des instances locales». Signe que la crise était prise très au sérieux, la délégation ministérielle était composée d'un gradé de haut rang du Conseil de souveraineté, ainsi que des ministres des Affaires étrangères, de l'Intérieur, de l'Energie et des Transports. Le ministre soudanais du Pétrole avait parlé samedi d'une situation «très grave», son pays étant déjà englué dans un marasme économique.