Dans une réunion, jeudi dernier, consacrée à la Libye, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté à l'unanimité une résolution qui confère à la Mission des Nations unies (Manul) la poursuite de sa mission jusqu'au...31 janvier 2022! Avec cette courte durée, c'est tout le travail de l'organisation onusienne et celui du représentant spécial Jan Kubis qui s'en trouve affaibli, conséquence du bras de fer, depuis trois semaines, au moins, entre la Russie et les Etats-Unis. On pensait mi-septembre que la Manul se verrait reconduite quasi automatiquement pour une année, comme c'est souvent le cas pour les autres missions de l'ONU. De plus, il lui incombe de mener à bien un scrutin présidentiel et législatif cruciaux, prévus le 24 décembre prochain, pour lesquels les efforts ont été intenses au cours des mois écoulés, tant au sein de l'organisation internationale que de l'Union africaine et de la Ligue arabe. Mais les 15 membres du Conseil en ont décidé autrement, signe que la résolution de la crise qui dure depuis une décennie n'est pas près d'être résolue. Les négociations entre la Russie, d'une part, et les Etats-Unis et le Royaume-Uni, d'autre part, ce dernier étant le rédacteur de la résolution, étaient bloquées depuis début septembre sur la question du retrait des mercenaires et forces étrangères, Moscou insistant sur la simultanéité du départ dans chaque camp libyen et réclamant une présence à Tripoli de l'émissaire onusien, Jan Kubis étant installé à Genève, à la suite d'un diktat en 2020 de Donald Trump, imposé aux 14 autres membres du Conseil de sécurité. Après un mois de tractations, aucun accord n'a vu le jour et c'est pourquoi le Conseil de sécurité de l'ONU a dû se contenter d'une demi-mesure, pour éviter le veto brandi par la Russie contre le texte britannique dont l'amendement lui paraît insuffisant. D'ailleurs, pour étayer son refus du projet de résolution britannique, Moscou a proposé son propre texte, une démarche rare qui détermine le degré de mésentente entre les membres permanents du Conseil de sécurité. Réuni en urgence, le P5 (les cinq membres permanents du Conseil: Etats-Unis, Russie, Chine, Royaume-Uni et France) a bien essayé de dénouer la crise et, pour finir, a simplement opté pour une seconde prolongation technique de la Manul jusqu'au 31 janvier prochain. Toujours est-il que la pression internationale pour la tenue des élections générales à la date prévue par le Forum de dialogue politique interlibyen (FDPL) demeure constante, même si des questions surgissent autour de la loi électorale qui oppose les deux camps de Tripoli et Benghazi. Le président du Parlement, Saleh Aguila, avait validé cette loi, sans vote des députés, afin de donner toutes ses chances au maréchal Khalifa Haftar qui s'est, aussitôt, dessaisi de ses fonctions à cette seule fin. Le départ prévisible de Jan Kubis, six mois après sa nomination, va, en outre, donner à l'Union africaine l'oportunité de revenir à la charge pour obtenir que le poste revienne de droit à un candidat africain, démarche à laquelle elle a dû renoncer malgré de fortes pressions, en 2020.