L'ouverture a été marquée par la présentation d'une comédie de Shakespeare. Le rideau se lève. Les comédiens apparaissent. Les spectateurs applaudissent. C'est le Festival national du théâtre professionnel qui, comme un nouveau-né, jette ses premiers regards autour de lui. Le coup d'envoi de cet événement culturel a été donné avant-hier au Théâtre national d'Alger, Mahieddine-Bachtarzi. Les artistes étaient nombreux. Tous joyeux de voir enfin se réaliser l'un de leurs rêves. Ce festival «permet au théâtre algérien de renaître de ses cendres tel le Phénix après tant d'années de silence à cause de la décennie noire qui a fait sombrer cet art dans la désolation, notamment par l'assassinat de deux de ses piliers, en l'occurrence Azzedine Medjoubi et Mohamed Alloula», a indiqué la ministre de la Culture, Khalida Toumi dans son discours d'ouverture. Elle a ajouté que cette manifestation «est un grand pas pour la restitution d'un important composant du mouvement artistique algérien visant à rehausser la face culturelle de notre pays» afin, a-t-elle souligné, de «construire une société cultivée, habilitée à s'ouvrir aux autres cultures en sauvegardant son identité». Pour sa part, le commissaire du festival, et non moins directeur du TNA, M.M'hamed Benguettaf a indiqué qu'«il (le festival) ne s'agissait pas d'une occasion de divertissement, mais plutôt d'une opportunité pour découvrir nos travaux artistiques d'une part et d'autre part de tenir compte des expériences étrangères dans ce domaine, symbole de conscience sociale». Il a également appelé à protéger la mémoire du théâtre algérien par «la sauvegarde de l'héritage des anciens pionniers du 4e art algérien» soulignant la nécessité de «bâtir un théâtre basé sur des fondements solides et la continuité dans le travail». En outre, la cérémonie d'ouverture a été marquée par deux représentations théâtrales. La première en hommage aux anciens comédiens, mise en scène par Youcef Atya et jouée par une troupe d'enfants de la Maison de jeunes de Bouzaréah. La deuxième pièce La nuit des rois, présentée hors compétition, a été jouée par les étudiants de l'Institut supérieur des matières de l'audiovisuel et de spectacle (Ismas). La nuit des rois est une comédie loufoque de Shakespeare, adaptée et mise en scène par Ahmed Khoudi. L'histoire se passe en Illyrie, une île imaginaire. La scène s'ouvre sur une scène où le duc Orsino se lamente sur l'indifférence pour lui d'Olivia, endeuillée par la mort de son frère. Dans cette situation dissymétrique s'insère le motif légendaire des deux jumeaux, avec Viola qui débarque en Illyrie après un naufrage où elle a été séparée de son frère Sébastien. Se déguisant en jeune homme du nom de Cesario, elle devient le page d'Orsino, qu'elle se met à aimer tandis qu'Olivia, à qui elle porte les messages d'Orsino, la prenant pour un homme, s'éprend d'elle. Un deuxième quiproquo est provoqué quand apparaît Sébastien. Olivia, ne le distinguant pas de Cesario, l'épouse. La situation se dénoue dans la scène finale où les deux jumeaux apparaissent ensemble. Et Cesario, redevenant Viola, épouse Orsino. Le désaccord initial entre Olivia et Orsino se résout quand ils deviennent frère et soeur par le double mariage qui s'interpose entre ces personnages doubles, Cesario transformé en Viola pour Orsino et remplacé par Sébastien pour Olivia. Dans sa mise en scène, Ahmed Khoudi n'a utilisé aucun décor. Interrogé à cet effet, il a indiqué que «cela est fait sciemment. J'ai voulu que les comédiens créent leurs propres décors et ce, en s'incrustant dans la peau des personnages...». Les comédiens de leur côté n'ont pas lésiné. Ils se sont donné à fond pour la réussite de cette pièce qui est d'une complexité inénarrable. Comme nous l'avons souligné en haut, cette pièce a été présentée hors compétition. Pour ce qui est de celles qui seront en lice, on cite Nora (La maison de poupée) du TNA, Le divorce du Théâtre régional d'Oran, Aïla Hamla (Une famille errante) du Théâtre régional de Béjaïa, Rah Ikheref (Il délire) du Théâtre régional de Sidi Bel Abbès, El Ambrator (l'Empereur) du théâtre de Batna et Djayeh, kebih ou medjnoune (Idiot, méchant et fou) du Théâtre d'Annaba. Les prix décernés par le festival concerneront essentiellement la meilleure pièce théâtrale, le meilleur texte, la meilleure mise en scène, les meilleures interprétations masculine et féminine, la meilleure scénographie et la meilleure création musicale.