Le rendez-vous afro-turc s'est terminé, avant-hier soir, sur une note optimiste. Le sommet a conclu à un Plan d'action couvrant la période 2022-2026. L'engagement personnel du président turc, Recep Tayyip Erdogan, à donner du sens à un partenariat qui monte en puissance dans diverses régions du continent, constitue une promesse ferme, dont les chances qu'elle soit tenue sont substantielles, au regard de l'intégration économique recherchée par les Etats africains. La Zone de libre-échange et de commerce africaine (Zlecaf) est une opportunité en or pour les partenaires de l'Afrique, à l'image de la Turquie et un sérieux atout entre les mains des Africains. D'ailleurs, Ankara ne cache pas son enthousiasme de jouer un rôle majeur dans la réussite de la Zlecaf. Erdogan ne s'en cache pas et espère voir les entreprises de son pays profiter de la disparition à terme des tarifs douaniers intra-africains. Mais pour les dirigeants africains, cela ne se fera pas sans des relations d'égal à égal avec l'Union africaine et les pays africains. Le sommet d'Istanbul, dont la finalité est justement d'établir cette précieuse relation, a mis à plat un partenariat vieux de plus d'une dizaine d'années et tracé un Plan d'action sur plusieurs axes. Pour les Africains, l'intensification des investissements et la promotion de la ressource humaine et de la formation sont une priorité. Les échanges commerciaux et le développement du commerce intéressent certainement plus les Turcs, le Plan d'action est donc destiné à faire la part des choses dans le sens d'une plus grande complémentarité entre les deux parties. Dans le partenariat multiforme qu'ambitionne Ankara, l'aspect politique n'est pas négligé. Il est même présenté comme l'un des atouts dans le jeu de la Turquie. Erdogan entend se placer comme «le porte-voix» de l'Afrique. Il promet de la défendre dans les différentes rencontres de par le monde. Il le fera sur la base d'une coopération économique étroite et des investissements tous azimuts. Un véritable ami du continent noir. Cette image que promeut l'Etat turc est déjà en marche dans un certain nombre de pays africains. Les «porte-voix» de la Turquie en Afrique existent bel et bien. Ce ne sont pas des présidents, mais d'intéressants projets économiques générateurs de plus-value et sources de devises pour nombre de pays. La force de la Turquie en Afrique pourrait être sa sincérité. En tout cas, l'Algérie qui a fait l'expérience de partenariats avec de nombreux pays, notamment les Etats membres de l'UE, est bien obligée de reconnaître l'efficience des projets lancés par les entreprises turques. Le bilan est on ne peut plus positif et l'ambition est d'aller plus loin encore. L'approche que propose Ankara en matière de codéveloppement économique est plus intéressante que celles des Occidentaux. Cela est un fait vérifiable en Algérie, en Egypte et dans certains autres pays africains. L'idée est de reproduire l'expérience à travers tous les territoires du continent noir. Cela passe par le raffermissement d'une vision volontariste qui fait de l'approche multidimensionnelle en direction de l'Afrique, un moyen privilégié pour développer des relations politiques étroites, consolidées «par la multiplication des visites bilatérales au plus haut niveau», estime Erdogan, visiblement, personnellement engagé dans la promotion tous azimuts de la coopération turco-africaine. Le président turc a raison d'opérer une approche novatrice dans son rapport à l'Afrique et booster les opérateurs économiques de son pays.L'enjeu est, en effet, de taille. La raison en est que la Turquie n'est pas le seul pays à s'intéresser à l'Afrique. La Chine, les Etats- Unis, la Russie et l'Union européenne ont tous montré une attention particulière en direction du continent. Dans ce «jeu» économique et géostratégique, les Etats qu'ils soient occidentaux ou orientaux s'appuient sur des pays-relais. Dans ce registre, l'Algérie coche toutes les cases. Cela lui confère la responsabilité de construire un partenariat intra-africain fort pour éviter que ne se répètent les expériences passées de spoliation des richesses de l'Afrique. Le renforcement de l'axe Alger-Abuja-Pretoria est l'un des objectifs prioritaires d'Alger, dont la diplomatie ne cache pas son activisme en faveur du projet de gazoduc transsaharien. Un projet intégrateur majeur, que doit porter le partenariat entre l'Afrique et le reste du monde. Cela en même temps que le projet du port centre de Cherchell, dont l'impact sur la rentabilisation de la route de l'Unité africaine n'est pas à démontrer. La Chine est, dit-on, sur la ligne de l'Afrique sur cette vision. Il reste à convaincre la Turquie dans l'entreprise d'intégration économique réelle du continent.