Les autorités tunisiennes ont lancé officiellement samedi la plate-forme électronique destinée à recueillir les propositions et autres doléances de la population en vue de la mise en oeuvre des réformes proposées par le président Kaïs Saïed, selon le ministère des Technologies qui précise que l'opération est engagée dans 24 régions du pays, notamment au niveau des maisons de jeunes, avant son élargissement le 15 janvier prochain. Elle doit durer jusqu'au 20 mars et on envisage de mettre à profit les comités de quartier des villes et villages, dans la mesure où seulement 45% des foyers disposent de la connexion Internet. L'invite du portail électronique, disponible sur le site www.e-istichara.tn., consacré à cette consultation nationale, est limpide: «Votre présent et votre avenir sont lancés», est-il indiqué au visiteur qui peut formuler son avis, une fois justifiée son identité, grâce à un code délivré par SMS. Différents domaines sont ouverts aux suggestions et critiques, notamment les questions politiques et électorales, économiques et financières, les problèmes sociaux, le développement et la transition numérique, la santé et la qualité de la vie, les affaires éducatives et culturelles. Le 25 juillet dernier, le chef de l'état tunisien avait limogé le Premier ministre et suspendu l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) dominée par le mouvement islamiste Ennahdha, après des mois de blocage politique et de dérives telles que l'exigence des membres d'Ennahdha d'une indemnisation pour les «persécutions» de la «dictature» sous la férule de l'ancien président Zine El Abidine Ben Ali. Arguant du fait que le pays était «en danger», en raison d'une crise sociale et sanitaire sans précédent, le président Kaïs Saïed, plébiscité lors d'un récent sondage par 66% des personnes interrogées, a dévoilé, le 13 décembre dernier, une feuille de route selon laquelle une élection législative interviendra en décembre 2022, au lendemain d'une révision de la loi électorale et d'un référendum sur un amendement de la Constitution de 2014 dont il entend qu'elle assure un certain équilibre entre les prérogatives du Parlement et celles de l'hôte de Carthage. Lequel amendement serait nourri par la somme des propositions et des critiques qui résulteront de la consultation populaire, ouverte samedi dernier, même si les détracteurs de la démarche crient au «coup d'état», alors que le président tunisien, élu avec presque 73% des suffrages, conserve toujours une popularité solide et majoritaire. Le bras de fer entre lui et le mouvement Ennahdha a connu, vendredi dernier, un nouvel épisode, avec l'arrestation et l'assignation à résidence d'un des piliers du parti islamiste, l'ancien ministre de la justice et vice-président d'Ennahdha, Nourredine Bhiri. Celui-ci a été interpellé en compagnie d'un ancien cadre du ministère de l'Intérieur, Fathi Baldi, pour des motifs qui n'ont pas encore été révélés.