La guerre en Ukraine touche aussi les Algériens. Ils sont des milliers à avoir choisi ce pays de l'Europe de l'Est pour y aller étudier, ou simplement émigrer. Parmi eux, Ghania. âgée de 22 ans, elle est arrivée à Kiev, l'été dernier, pour y suivre un master en marketing. «Jusqu'ici, tout se passait bien. On vivait, certes, avec la menace permanente d'une guerre mais, au fond de nous on se disait que cela n'arriverait jamais», a indiqué cette jeune fille, originaire d'un petit village de la wilaya de Tizi Ouzou. Elle avoue même que la nuit du déclenchement des hostilités, elle avait passé la soirée au restaurant, avec ses copines. «On a ensuite veillé chez l'une d'elles, jusqu'à très tôt le matin. Un décor apocalyptique! C'est en rentrant chez moi, vers 5h du matin, que j'ai vu sur les réseaux sociaux, que le pays était attaqué», poursuit-elle. C'est alors qu'elle prend contact avec ses copines de «la fac», de différentes nationalités, pour savoir ce qu'il fallait faire. «Vite on décide de prendre, ensemble, la route vers la frontière polonaise. On s'est dit: «Plus vite on ira, plus vite on arrivera, on évitera de tomber dans les embouteillages et, surtout, on aura une chance de survivre», soutient-elle. C'est ce que Ghania et ses copines ont fait dès jeudi, à 8h30 du matin. Elles trouvent un taxieur qui a accepté de les prendre à prix fort. «On l'a payé quatre fois le prix normal de la course. Il a aussi exigé que le paiement se fasse en euros au lieu de hryvnias (monnaie ukrainienne, Ndlr)», poursuit-elle assurant ne pas avoir regretté ce choix. «Sur la route, on a trouvé des milliers de personnes qui se rendaient à la frontière à pied», raconte-t-elle. «Un véritable calvaire qui ne leur a pas suffi pour sortir de cet enfer, puisqu'à un moment les services de sécurité interdisent aux personnes se déplaçant à pied de poursuivre leur chemin», ajoute-t-elle soulignant que même les transports publics ont fini par être «HS». Les premiers qui ont pris les transports ont pu arriver à la frontière, les autres se sont retrouvés bloqués, au milieu de nulle part, à attendre une solution pour pouvoir quitter ce pays en guerre. Après plus de 28heures de route, de peur et d'angoisse, elles finissent par arriver à la frontière polonaise. Un trajet qui, en temps normal, ne dépasse pas les 10heures de route. Un monde fou y est rassemblé. Malgré la panique et la guerre, les choses se font dans l'ordre. Chacun attend patiemment son tour, soulagé que cet enfer puisse enfin se terminer. Après presque 10 heures d'attente, c'est la douche froide! L'Ukrainienne qui était avec eux est autorisée à rentrer en Pologne, mais pas Ghania et ses copines tunisiennes et marocaines. «On nous apprend que les Maghrébins ne sont pas autorisés à accéder à la frontière sans visa. Tous nos espoirs s'évanouissent! On se voit mourir de faim, de froid, ou tué par un obus dans des frontières qui ne sont pas celles de notre pays», se remémore-t-elle, les larmes aux yeux. «À ce moment, c'est la grande désillusion. La fatigue, la peur, la faim. On sent vraiment que c'est la guerre. On fond en larmes», raconte-t-elle. Une situation qui dure pendant des heures, avant qu'une lueur d'espoir n'apparaisse. Il s'agit d'un agent de l'ambassade d'Algérie, à Varsovie. Il leur promet que les autorités algériennes travailleront d'arrache-pied afin de trouver une solution rapide à leur situation. La douche froide, puis...l'espoir Le temps passe, leurs espoirs s'amenuisent! Jusqu'à samedi soir où la même personne vient leur annoncer la fin du cauchemar. Ils pourront passer, dès ce soir, la frontière, avec un visa d'un mois, leur demandant, néanmoins, de faire preuve de patience et d'attendre leur tour. Hier matin, c'était le dénouement pour la jeune étudiante: elle est en Pologne! «Je vais aller me reposer, dormir, après trois jours sans avoir fermé l'oeil, avant de voir la suite à donner. «L'essentiel est que je suis loin de la guerre», se réjouit-elle. Ce qui n'est pas le cas de Samir. Lui aussi, étudiant en Ukraine, dans la ville de Kharkiv, proche de la frontière avec la Russie. Il est, néanmoins, encore bloqué en zone de conflit du fait de ses moyens limités mais surtout du fait qu'il a pris trop tard conscience que c'est la... guerre. «Je me disais que cela n'arriverait jamais dans un pays européen. Je me suis dit: Au pire, il s'agira de quelques petits combats aux frontières avant qu'un obus n'explose, à quelques mètres de moi», révèle-t-il avec la chair de poule. Il finit par se rendre à l'évidence! Il décide d'essayer de quitter le pays. «Depuis vendredi, je dors dans les bouches de métro ou dans des bunkers. J'avance à petit pas, dans l'espoir d'arriver à la ville de Lviv, proche des frontières polonaise et slovaque», indique-t-il, avant d'être «coupé» à cause d'une mauvaise connexion. Voici donc un cour récit de l'enfer ukrainien, où y séjournent un millier d'étudiants algériens...