Moscou a promis jeudi l'ouverture quotidienne de couloirs humanitaires pour permettre aux Ukrainiens fuyant les combats de gagner la Russie, alors même que son armée poursuivait sa manoeuvre d'encerclement de Kiev. L'Ukraine, où la population des villes assiégées par les troupes russes est obligée de vivre terrée en raison des bombardements, réclame pour sa part la mise en place de passages sécurisés en vue des évacuations de civils à l'intérieur de ses frontières. «Nous annonçons officiellement que des couloirs humanitaires pour la Fédération de Russie seront désormais ouverts unilatéralement, sans coordination, chaque jour à partir de 10h00 du matin», tandis que ceux allant «dans d'autres directions seront négociés avec la partie ukrainienne», a déclaré dans la soirée le ministère russe de la Défense. Dans la soirée, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a indiqué qu'environ 100.000 personnes avaient quitté ces deux derniers jours d'autres villes ukrainiennes en proie aux combats, dont 40.000 personnes rien que jeudi, via des couloirs humanitaires. Sur le terrain, après avoir auparavant atteint les faubourgs nord et ouest de Kiev, des chars russes sont arrivés jeudi à proximité de son entrée nord-est. En fin de matinée, une pluie de roquettes russes Grad s'est abattue sur la localité déserte de Velyka Dymerka, à environ cinq kilomètres des limites de Kiev. Selon l'état-major ukrainien, les forces russes, tout en continuant leur «opération offensive» pour encercler la capitale, attaquent sur d'autres fronts, dans l'est. Aucun progrès à Antalya De leur côté, les ministres russe et ukrainien des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et Dmytro Kuleba ont campé sur leurs positions au cours de leurs discussions sous les auspices de leur homologue turc Mevlut Cavusoglu à Antalya, une station balnéaire du sud de la Turquie prisée des touristes russes. «Nous avons évoqué un cessez-le-feu, mais aucun progrès n'a été accompli en ce sens», a déclaré Kuleba. Le chef de la diplomatie ukrainienne a révélé que Sergueï Lavrov lui avait assuré que la Russie «allait continuer (son) agression jusqu'à ce que nous acceptions sa demande de capituler». Mais «l'Ukraine ne s'est pas rendue, ne se rend pas et ne se rendra pas», a-t-il clamé. Le ministre russe, selon lequel la Russie n'a «pas attaqué l'Ukraine», s'est prononcé pour la poursuite du dialogue avec l'Ukraine. Trois sessions de pourparlers entre négociateurs russes et ukrainiens ont déjà eu lieu dans cet Etat allié de Moscou, depuis le début de l'invasion, aboutissant à plusieurs cessez-le-feu locaux et à l'ouverture au compte-gouttes de couloirs humanitaires pour évacuer des civils de villes encerclées. L'Ukraine et la Russie sont par ailleurs «prêtes» à discuter pour garantir la sécurité des sites nucléaires ukrainiens, Les dirigeants français et allemand Emmanuel Macron et Olaf Scholz ont, dans un entretien téléphonique avec M. Poutine, «insisté sur le fait que toute solution à la crise devait passer par des négociations entre l'Ukraine et la Russie» et exigé «un cessez-le-feu immédiat». Nouvelles sanctions occidentales La moitié de la population de l'agglomération de Kiev a fui en deux semaines, a annoncé son maire, Vitali Klitschko, affirmant que, désormais, «un peu moins de deux millions d'habitants» s'y trouvaient. Les dégâts provoqués par la guerre sont pour l'instant évalués à 100 milliards de dollars par l'Ukraine. Face à cette situation, les Américains et leurs alliés s'efforcent d'aider ce pays tout en évitant l'implication militaire directe des Etats membres de l'Otan. Les Etats-Unis, estimant jeudi que l'Ukraine n'avait pas vraiment besoin d'avions de combat pour contrer les attaques russes, ont envisagé de lui fournir davantage de systèmes de défense sol-air. En Turquie, M. Lavrov a jugé «dangereuse» la fourniture d'armes par les Occidentaux aux Ukrainiens, dénonçant en particulier l'envoi de missiles sol-air portables. S'exprimant à l'occasion d'un sommet de deux jours des 27 à Versailles, près de Paris, Emmanuel Macron a jugé que l'Union européenne allait «changer plus vite et plus fort sous le coup de la guerre», tandis que, de Varsovie, la vice-présidente américaine Kamala Harris a considéré que l'Otan était devenue «plus forte» et la Russie «plus faible». En attendant, l'accueil de millions de réfugiés ukrainiens est un «très, très gros défi», mais les pays membres de l'Union européenne font preuve d'une solidarité «sans précédent», a noté la commissaire aux Affaires intérieures Ylva Johansson. Après deux semaines de conflit, les sanctions occidentales continuent de pleuvoir sur la Russie, avec notamment le gel au Royaume-Uni des avoirs de sept oligarques russes dont Roman Abramovitch. Les Etats du G7 ont quant à eux appelé les pays producteurs de gaz et de pétrole à «augmenter leurs livraisons» pour faire face à la hausse des prix de l'énergie et aux risques de pénuries.