Le Bélarus a annoncé, hier, la poursuite des exercices militaires conjoints avec la Russie sur son territoire, aux frontières de l'Ukraine, où les Occidentaux redoutent une attaque d'ampleur de Moscou. Cette annonce intervient peu avant un appel téléphonique entre le président français Emmanuel Macron et son homologue russe Vladimir Poutine, que l'Elysée a décrit comme «les derniers efforts possibles et nécessaires pour éviter un conflit majeur en Ukraine», après leur rencontre le 7 février. Moscou avait auparavant annoncé que les quelque 30.000 soldats russes, selon le décompte des Etats-Unis, se trouvant au Bélarus pour des exercices militaires depuis le 10 février se retireraient à l'issue de ceux-ci, hier. À la place d'un retrait, le ministère bélarusse de la Défense a annoncé que Minsk et Moscou avaient décidé de «poursuivre l'inspection des forces» du fait de la flambée de violences dans l'est de l'Ukraine, où les forces de Kiev combattent des séparatistes pro russes soutenus par la Russie. La Russie est déjà accusée par les Occidentaux, malgré plusieurs annonces de retrait militaire, d'avoir massé 150.000 soldats aux frontières de l'Ukraine, en Russie et au Bélarus, en vue d'une invasion que les Etats-Unis et d'autres pays présentent comme imminente. Moscou se défend de tout projet d'invasion mais réclame des garanties pour sa sécurité, dont la promesse que l'Ukraine n'intègrera jamais l'Otan et la fin du renforcement des forces de l'Alliance à ses frontières, autant de demandes que les Occidentaux ont rejetées. Cette crise a provoqué une escalade des tensions telle que l'Europe n'a pas connu depuis la Guerre froide. Emboîtant le pas des Etats-Unis et de l'Otan, qui ont dit craindre une «attaque de grande ampleur», le Premier ministre britannique, Boris Johnson, a assuré, hier, que la Russie préparait «ce qui pourrait être la plus grande guerre en Europe depuis 1945». Selon lui, une invasion russe de l'Ukraine se ferait non seulement par l'Est, mais également par le Nord, via le Bélarus, pour «encercler Kiev».»Tous les signes indiquent que la Russie prévoit une attaque complète», a affirmé samedi Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l'Otan, que Kiev souhaite rejoindre. Le président américain Joe Biden a convoqué le Conseil de sécurité nationale pour une réunion de crise, hier soir. Signe que la voie diplomatique reste ouverte, son secrétaire d'Etat Antony Blinken et le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov doivent se rencontrer le 24 février. Kiev et les Occidentaux craignent que la Russie, qui a déjà annexé la Crimée en 2014, ne cherche un casus belli pour attaquer l'Ukraine et que la récente reprise d'intenses combats entre armée ukrainienne et séparatistes pro russes dans l'Est ne soit ce prétexte. L'appel Macron-Poutine d'hier intervient, alors que les tirs sont nourris sur le front dans l'est ukrainien, les observateurs de l'OSCE signalant plus de 1.500 violations du cessez-le-feu entre jeudi et vendredi, un record cette année. Dans ce contexte de volatilité extrême, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a exhorté samedi les Occidentaux à cesser leur politique «d'apaisement» vis-à-vis de Moscou et à augmenter leur aide militaire à Kiev, «bouclier de l'Europe». Le même jour, la Russie menait sous supervision de Vladimir Poutine des tirs d'exercices de missiles pouvant porter des charges nucléaires. «Nous ne pouvons pas éternellement offrir un rameau d'olivier alors que la Russie effectue des tests de missiles et continue d'amasser des troupes» à la frontière ukrainienne, a réagi, hier, le président du Conseil européen Charles Michel. Sur le front, dans l'est de l'Ukraine, les combats redoublaient d'intensité. Kiev et les séparatistes s'accusent mutuellement d'envenimer ce conflit qui a fait plus de 14.000 morts depuis 2014. Renforçant l'inquiétude, les séparatistes pro russes ont annoncé samedi une «mobilisation générale» des hommes en état de combattre, après avoir ordonné l'évacuation de civils vers la Russie voisine, qui a affirmé, hier, en avoir accueilli plus de 40.000. Dans la nuit de samedi à dimanche, ils ont à nouveau accusé l'armée ukrainienne de dizaines de tirs violant le cessez-le-feu, au mortier et à l'obusier, et assurent que l'Ukraine prépare une attaque, ce que Kiev dément. Les milices de la «république» séparatiste de Lougansk ont assuré avoir repoussé une attaque de militaires ukrainiens, hier, à l'aube, lors de laquelle, selon cette source, deux civils ont été tués. Une annonce qualifiée de «désinformation absolue» par Kiev.