Les forces russes sont désormais autour de Kiev: un centre commercial de la capitale ukrainienne a été ravagé par un bombardement, Moscou ayant ciblé une cache d'armes, tandis que l'Union européenne a qualifié lundi la situation de la ville assiégée de Marioupol de «crime de guerre majeur». À Washington, le président Joe Biden dit craindre d'éventuelles cyberattaques russes en réponse aux sanctions occidentales. Au 26e jour de l'intervention en Ukraine décidée par le président russe, Vladimir Poutine, les bombardements se sont poursuivis sur nombre de villes: Kiev, Kharkiv, Marioupol, Odessa, Mykolaïv...À Kiev, un nouveau couvre-feu est entré en vigueur lundi à 20h00 (18h00 GMT) jusqu'à aujourd'hui, 07h00. Tard dimanche soir, une puissante frappe russe, peut-être un missile, aurait détruit l'immense centre commercial «Retroville», dans le nord-ouest de Kiev, secouant toute la ville. Moscou a précisé que le centre commercial «inopérant» servait de dépôt d'armements. «Une batterie de lance-roquettes multiples et une base de stockage de leurs munitions a été détruite avec des armes de précision à longue portée», a déclaré le ministère russe de la Défense. Les restes d'un énorme bloc moteur, fiché dans le sol, et des morceaux de carcasses d'acier vert caractéristiques font inévitablement penser à des engins blindés. De l'avis de tous sur le site, il s'agit de l'attaque la plus violente contre Kiev depuis le début de la guerre. L'explosion a détruit les vitres de tout le quartier et endommagé une dizaine d'immeubles. Débris, véhicules anéantis et ferrailles tordues jonchaient la scène sur des centaines de mètres. D'un immeuble de 10 étages carbonisé, il ne reste que la structure en béton. À Marioupol, grande ville portuaire du sud, majoritairement russophone, assiégée et bombardée depuis des semaines par les Russes, quelque 350.000 habitants restent bloqués, manquant de tout. Moscou avait demandé dimanche aux défenseurs de la ville de «déposer les armes». Marioupol, cible stratégique pour les Russes, constitue un pont terrestre entre leurs forces en Crimée, au sud-ouest, et les territoires qu'ils contrôlent au nord et à l'est. Selon l'administration militaire de la région de Donetsk, l'un de ces territoires de l'est, «plus de 80% des infrastructures de la ville sont endommagées ou détruites». La situation humanitaire y est «extrêmement grave», selon l'ONU, avec «une pénurie critique et potentiellement mortelle de nourriture, d'eau et de médicaments». Ce lundi, M. Biden et les dirigeants français Emmanuel Macron, britannique Boris Johnson, allemand Olaf Scholtz et italien Mario Draghi se sont entretenus par vidéoconférence notamment de la «situation humanitaire critique à Marioupol, et l'urgence d'obtenir un accès sans entrave de l'aide humanitaire», a indiqué la Présidence française. Lundi, 3 007 personnes évacuées de Marioupol sont arrivées à Zaporojie, à environ 200 km au nord-ouest, selon la Présidence ukrainienne. Le ministre ukrainien de la Défense Oleksii Reznikov a admis que «la situation est très difficile» face à «un ennemi très supérieur numériquement et la menace d'une invasion terrestre de l'armée» du Bélarus, allié de Moscou, a-t-il ajouté. Les Européens, très dépendants des hydrocarbures russes, ont jusqu'ici exclu de sanctionner ce secteur, très important pour l'économie de la Russie. Et le Kremlin a averti qu'un embargo européen sur le pétrole russe frapperait «tout le monde». Les cours du pétrole ont bondi de plus de 7% lundi, le Brent européen et le WTI américain repassant tous deux le seuil des 110 dollars le baril, stimulés par la perspective d'un possible embargo européen. Réunis à Bruxelles, les ministres des Affaires étrangères et de la Défense de l'UE ont décidé de doubler leur soutien financier pour les achats d'armements envoyés à Kiev, après l'épuisement d'une première enveloppe de 500 millions d'euros. Une intense activité diplomatique attend cette semaine le président américain, qui participera jeudi à Bruxelles à un sommet extraordinaire de l'Otan, une réunion du G7 et un sommet de l'UE. Il se rendra vendredi et samedi en Pologne, principal pays d'arrivée des réfugiés ukrainiens. Près de 3,5 millions de personnes - essentiellement des femmes et des enfants - ont fui l'Ukraine depuis le 24 février, selon le décompte de l'ONU publié lundi. À Moscou, le ministère russe des Affaires étrangères a lui estimé que le président Biden avait conduit les relations russo-américaines «au bord de la rupture» par ses déclarations «indignes» visant Vladimir Poutine, qu'il a qualifié de «criminel de guerre». L'ambassadeur américain a été convoqué lundi. Victimes collatérales de la guerre en Ukraine: les négociations russo-japonaises sur le sort de quatre petites îles de l'archipel des Kouriles. Moscou a annoncé lundi abandonner les pourparlers, arguant de la «position inamicale» de Tokyo face au conflit en Ukraine. Le Japon a protesté, hier, contre cette décision. En Russie, ce sont les géants américains des réseaux sociaux Facebook et Instagram qui ont été interdits lundi pour extrémisme.